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  #1  
Vieux 02/06/2008, 06h29
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[20:58:20] Akmar Nibelung, Gott dit:
je m'incruste pour faire genre j'ai des amis autres que les pizzas
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Vieux 02/06/2008, 09h00
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Marc Aurèle n'est vraiment pas pressé de rentrer à Rome : il part d'Egypte en mars, à l'orée de la saison navigable : il attendait le beau temps et en quelques semaines (disons en mai), il aurait pu être à Rome en voyageant par mer.
C'est vrai que la navigation est toujours aléatoire en ces temps, mais c'est indicatif : jamais au début de l'Empire, un prince n'aurait osé s'absenter aussi longtemps de Rome de crainte d'une fronde du Sénat et d'une usurpation. Dans un siècle, Rome aura perdu presque toute importance politique...

Sinon, pour Schnickeon, les lions ou le bain d'huile bouillante ?
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Ce sont les événements qui commandent aux hommes et non les hommes aux événements.
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Rien n'arrête le progrès. Il s'arrête tout seul.
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Vieux 02/06/2008, 09h13
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Trés juste, d'autant plus que sa déjà trés longue absence aurait nécéssité sa présence rapide. Qui plus est, aprés cette marche triomphale du port de Brindisi jusqu'à Rome, Marc Auréle a encore pris le luxe de ne pas s'installer dans les Palais du Palatin (donc à l'interieur de Rome) mais à Lavinium (une petite ville quelques kilométres plus au sud de la capitale)
De là à voir un empereur qui fuyait Rome... (sur un régne de 19 ans, il en aura passé prés de 15 aux frontiéres, principalement à lutter contre les menaces barbares. Pour certains historiens, le début du déclin de Rome date de son régne, avec des secousses qui donnent une idée des invasions qui surviendront de plus en plus souvent, jusqu'au saccage final de Rome au Véme siécle)
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  #4  
Vieux 02/06/2008, 09h59
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Qui plus est, aprés cette marche triomphale du port de Brindisi jusqu'à Rome, Marc Auréle a encore pris le luxe de ne pas s'installer dans les Palais du Palatin (donc à l'interieur de Rome) mais à Lavinium (une petite ville quelques kilométres plus au sud de la capitale)
Est-ce qu'il n'y avait pas une disposition qui interdisait aux généraux victorieux de rentrer dans Rome avant leur triomphe ?
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  #5  
Vieux 02/06/2008, 10h09
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Est-ce qu'il n'y avait pas une disposition qui interdisait aux généraux victorieux de rentrer dans Rome avant leur triomphe ?
Bonne question !
Mais à l'époque impérial, je ne pense pas que cela concernait l'Empereur(d'autant plus que Marc Auréle avait mis là les grands plats dans les grands : dés son arrivée en Italie, il s'était vétu de sa toge et avait laissé tombé la cuirasse, et apparement l'armée qui le suivait avait fait de même )
Qui plus est, dans l'enceinte même de Rome, Marc Auréle avait été acclamé Imperator par ses troupes, plus d'un mois avant le triomphe proprement dit.

Apparement, c'était plus un geste trahissant la lassitude de l'homme (que les épreuves avaient considérablement vieilli)
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  #6  
Vieux 02/06/2008, 10h34
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Sinon, pour Schnickeon, les lions ou le bain d'huile bouillante ?
Machiavel n'en a pas été victime à ce que je sache et à Rome, les intrigues étaient également monnaie courante... L'intelligence aura raison de la force brute
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Seule une femme peut vous consoler d'être moche.
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  #7  
Vieux 10/06/2008, 13h26
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Chapitre 11 : Schnickeon, Chal et Perennis, de l'Affrontement des Favoris


Je reportais quelques instants mes yeux sur le Triomphe qui s’étendait plus bas, impérial. J’avais constaté, amer, que Schnickeon en faisait parti, suivant de quelques pas le char où trônait Commode. J’avais également remarqué un visage impavide qui était loin de m’être inconnu, et même si j’avais espéré me tromper, du fait de la distance qui me séparait de la procession, l’armure et le casque étaient bien celui de Julius Sentencius. Le centurion avait certainement fini sa sordide tâche, même si les rumeurs, encore plus insistantes maintenant que l’on était à Rome, affirmaient qu’un jeune inconnu, certainement un fils adoptif ou l’un des enfants illégitimes d’Avidius Cassius, avait réussi à échapper au massacre qui avait touché tous les membres de la famille du général.

A mes côtés, Lucius Coelius regardait lui aussi le spectacle, un léger sourire aux lèvres – je ne savais pas si je devais y voir du sarcasme ou de l’admiration. L’enquêteur était bon, et déjà de nombreux notables lui avaient confié des missions requérrant un minimum de discrétion dans une ville aussi bavarde que Rome. De plus – et c’était là ce qui avait emporté ma décision – l’homme avait déjà voyagé pendant de nombreuses années en Orient, j’espérais donc que la connaissance qu’il pouvait avoir des peuples de Judée Samarie lui permettrait rapidement de retrouver la trace de mon frère Chazam, disparu 1 an plus tôt.



Une poignée de soldats triomphants passant sous l'arc de Titus


Tandis que son fils Jmlus restait sur place, les yeux grands ouverts et les cheveux en bataille, j’entraînais Coelius sous les arcades afin de lui donner toutes les informations qui pouvaient lui être d’une aide quelconque. Si nous étions d’accord que Chazam avait disparu aux environs de Jérusalem, Coelius estimait que son enquête devait débuter à Césarée, le port ou mon frère avait débarqué. Alors que je poussais Coelius à aller directement au cœur du problème, celui-ci me fit sagement remarquer qu’après plusieurs mois, la piste avait largement eut le temps de refroidir et que quelques jours de plus n’y changeraient rien. Coelius espérait surtout trouver des éléments expliquant la disparition de Chazam quelques jours en amont, alors que ce dernier effectuait le voyage entre Césarée et Jérusalem.

L’homme m’avait été chaudement recommandé, mais je découvrais là un homme honnête, patient, et qui s’annonçait méticuleux. J’avais toutes les chances de mon côté pour pouvoir retrouver Chazam. Tandis qu’une bourse pleine passait de ma ceinture à la sienne, je faisais une prière silencieuse aux dieux afin qu’ils guident Coelius sur la bonne voie.

Une semaine s’écoula, et j’imaginais déjà Coelius voguer sur la Méditerranée, quand vint l’heure du second triomphe pour Commode, moins formaliste mais tout aussi important que celui qui avait fêté la victoire de Marc Aurèle sur ses adversaires. Le petit morveux n’avait pas encore fêté ses 16 ans que son père lui offrait le titre de Consul, marquant par là même sa décision que son fils lui succéderait – ce qui était tout sauf évident pour le régime que nous connaissons .
L’année 177 commençait ainsi sous de bien mauvais augures, même si le plébéien de base se félicitait sottement de la décision du vieil empereur.
Je devais admettre que les choses avaient été faites en grand, et l’association de Commode aux victoires de son père laissait chez tous l’image d’un adolescent courageux et amené à rajeunir et revitaliser l’Empire. Le cadeau impérial que reçurent tous les Romains avait également largement favorisé la liesse qui s’étendait à toute la ville : après 8 ans d’absence, et pour fêter son retour et la position occupée par Commode, Marc Aurèle avait fait distribuer 8 pièces d’or, soit 800 sesterces, à chaque citoyen.

Un matin, un esclave apporta chez moi un petit sac de cuir fermé par un cordon, provenant directement du Palatin. Je l’ouvrais, et y trouvais les 8 pièces qui étaient traditionnellement distribuées aux seuls plébéiens. Je prenais l’une des pièces entre mes doigts, sans comprendre pourquoi je recevais ce qui apparemment ne m’était pas destiné, avant de blêmir et de lâcher le tout sur le sol en marbre. L’un des pièces roula sur 2 ou 3 mètres, avant de s’échouer contre la bute qui surélevait la grande cheminée qui réchauffait toute la pièce. La pièce sembla hésiter quelques instants, avant de tomber avec un petit bruit mélodieux.
Je me rapprochais, regardant le côté face de la pièce, parfaitement visible. Je reconnaissais le visage de Faustine, qui semblait cerné de flammes : l’or renvoyait les reflets venant de l’âtre, dans une image qui m’épouvanta. Même disparue, Faustine était appelée à me hanter, me poursuivant dans mes rêves et même ici, chez moi. Je quittais la pièce, sachant qu’à mon retour l’un des esclaves aurait certainement fait disparaître ces pièces qui m’effrayaient tant. C’était la première fois que j’avais sous les yeux le résultat de l’un des souhaits de Marc Aurèle, décidé un an et demi plus tôt à Halala – ou plutôt Faustinopolis. Des pièces à l’effigie de Faustine avaient donc été frappées après sa mort, empêchant quiconque (et surtout moi) d’oublier son visage.



Oh qu'elle est ... euh... belle !


Mais comme elles étaient rares parmi l’incroyable masse monétaire sortant chaque année du Trésor Romain, je n’avais pas à chercher loin pour trouver l’instigateur de ce cadeau empoisonné : Schnickeon se rappelait à mon bon souvenir, affirmant par là que je lui étais toujours redevable. J’étais surpris qu’il s’intéresse encore à moi alors que l’affrontement avec Perennis et son fils Chal prenait une tournure des plus sérieuses. Commode devenu Consul, il n’y aurait la place que pour un seul favori, qui concentrerait entre ses mains un pouvoir potentiellement illimité. Chacun des coups qui étaient désormais portés à l’autre avait pour but non pas seulement de l’éloigner de Commode, mais de le discréditer, lui faire perdre la face et la vie.

C’est dans ce climat particulièrement étrange que débarqua à Ostie le gouverneur de Cappadoce, Venitius Varon. L’homme avait deux ans auparavant sauvé la mise à l’empereur en Orient, s’assurant de la fidélité de ses troupes et faisant tout pour que la révolte d’Avidius Cassius soit circonscrite à la seule Egypte. Sa venue sembla surprendre agréablement Marc Aurèle, tandis que le reste de la Cour était dans l’expectative, s’attendant à un nouveau coup tordu entre Schnickeon, Perennis et Chal. Les courants se faisaient et se défaisaient au rythme des victoires des uns ou des autres, dans un ballet se révélant mortel pour celui qui se trompait sur le sens d’où soufflait le vent.

J’eus la chance, comme beaucoup d’autres, d’assister à l’entrevue entre Marc Aurèle et Venitius Varon. Celui-ci était suivi d’un jeune homme qui m’était parfaitement inconnu, et que Venitius présenta en ses termes à Marc Aurèle :

"- Altesse, j’étais présent lors du repas où vous avez assuré ne pas rejeter la faute du général Avidius Cassius sur sa progéniture, sa famille ou l’un des quelconques membres de sa descendance. Cette promesse, vous l’avez également faite auprès des Sénateurs, et il n’est pas dit que je laisse par mon inaction votre parole être désavouée, à votre insu, par des comploteurs. Ce jeune architecte s’est jeté à mes pieds alors qu’il fuyait depuis plus d’un an une mort certaine, celle qui s’est abattue sur ses frères, ses sœurs, sa mère, à travers tout l’empire. Altesse, je vous présente le dernier fils du général Avidius Cassius, Caius Avidius, et j’espère que vous trouverez celui qui complote contre votre auguste personne, en vous défiant de la sorte."



Avant de construire ça, mange ta soupe ! (Avidius Cassius à son jeune fils Caius Avidius)


Quelques exclamations s’entendirent parmi les témoins, peu habitués à ce qu’un empereur se voit tenu un discours de la sorte. Je savais pourtant que Venitius Varon était certainement l’un des rares gouverneurs, peut être le seul, à pouvoir s’adresser de telle manière à Marc Aurèle : sa fidélité lui conférait une assurance et une liberté de parole que tous ne pouvaient avoir.
Tandis que Marc Aurèle digérait ces paroles, je m’attardais un peu sur les traits d’Avidius Caius. L’homme avait aussi de la trempe, après avoir fuit pendant des mois le glaive de Julius Sentencius, de se jeter ainsi dans la gueule même de l’ennemi. Mais c’était particulièrement judicieux, puisqu’il venait rappeler les paroles proférées par l’empereur et qui avaient été démenties par la suite - se plaçant ainsi sous sa justice, mais surtout celle de Rome, seule à même de le sauver. C’était très bien joué, et celui qui s’avéra un jeune architecte pu ainsi commencer sa carrière pour le bien de Rome, à construire cirques et amphithéâtres, une fois absout des fautes de son général de père.

Dans l’entourage de Commode, à quelques mètres l’un de l’autre, Perennis et Chal jubilaient tandis que Schnickeon présentait un visage livide.


Sauras tu retrouver qui s'ennuit et n'a plus d'amis ?
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  #8  
Vieux 16/06/2008, 00h22
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Chapitre 12 : Des qualités du jeune Caius Avidius, futur bâtisseur


La révélation faite par le gouverneur de Cappadoce, Venitius Varon, eut des conséquences directes sur l’entourage de Commode. Marc Aurèle, a qui il avait été fait le grief, en public, d’avoir au mieux été dans l’ignorance de l’assassinat commandité sur la famille du général Avidius Cassius, sinon d’avoir délibérément menti, ne pouvait laisser un tel fait entacher une réputation qui jusque là était sans faille. Je découvrais ainsi dans l’intimité un homme finalement assez soucieux de l’image qu’il laisserait dans la postérité. L’égo un tant soit peu exacerbé de tout homme ayant dans ses mains la destiné d’un Empire et de ses 70 millions de sujets ? Ou le philosophe qui ne voulait pas que les actes de toute une vie, appelés à être commentés par ses successeurs, ne soient jugés à l’aune de ce qui révélait, certainement, d’une faute ?

Même au service de cet homme, je n’eux jamais la certitude qu’il fut responsable ou non, directement, des nombreux décès ayant frappé la famille Cassius. Mais le déballage public qui avait suivit l’affaire obligea l’empereur à s’excuser auprès du dernier fils du général, Caius Avidius. L’affaire pu être arrangée par la conclusion d’un contrat visant la réfaction de bâtiments publics à Rome même, et dont Avidius se vit chargé par cooptation impériale. J’eus l’occasion par la suite de me trouver quelques fois en contact avec le jeune Avidius, et l’image qu’il me laissa était particulièrement mitigée. Le jeune architecte était talentueux, certes, mais ses qualités humaines bien plus discutables. Faisant peu de cas des ouvriers qui travaillaient sur les chantiers, il accélérait sans cesse les constructions, rognait sur les coûts et la sécurité, ce qui se traduisit par un nombre anormal d’accidents mortels lors des travaux. Sa réputation fut bientôt faite et Avidius vit rapidement le nombre de travailleurs libres travaillant sous ses ordres chuter, au point qu’il dut avoir recours à un nombre important d’esclaves pour colmater les accidents et les départs.

Chose étrange également chez un homme venant d’une famille illustre - bien que le nom du général ait été effacé des édifices suite à sa sédition – était cette passion que le jeune Avidius semblait avoir pour tout ce qui se rapprochait du monde de l’arène, des gladiateurs et du sable que l’on versait sur le sang encore frais sur la piste. C’était là une passion fort compréhensible pour la plèbe, qui trouvait là un exutoire à sa basse condition, mais bien plus rare chez les patriciens et les chevaliers romains. Les sénateurs continuaient bien à se déplacer dans l’enceinte du Cirque Flavien, mais c’était souvent par nécessité d’être vu, et il n’étaient pas rare d’en voir certains s’endormir sur les gradins tandis que la foule s’enthousiasmait devant une nouvelle hécatombe.



Avidius Caius regardant l'équivalant du Drucker local


J’avais de mon côté bien du mal à voir un quelconque intérêt à ces spectacles, ce que mon entourage mettait sur le compte de mon origine grecque. La vérité était bien plus crue : suivant Marc Aurèle durant ses 6 années de guerre sur les rives du Danube, j’avais eu sous les yeux une cohorte de blessés et de morts, peut être bien plus que tout autre chirurgien grec ou romain. Aussi voir des hommes s’entretuer pour le seul plaisir de pauvres hères qui emplissaient les cirques, cela dépassait mon entendement.

Avidius semblait donc particulièrement apprécier la vie qu’il menait à Rome, et jamais je n’entendis de sa bouche une quelconque plainte sur le sort qui avait touché sa famille. Je le soupçonnais rapidement d’avoir pris la fuite pour éviter le glaive de Sentencius, mais sans qu’il ait exprimé un quelconque regret quant au sort qui avait frappé ses parents ou sa fratrie.

Dans le même temps qu’il donnait d’une main, Marc Aurèle se vit dans l’obligation de sévir et le coupable fut tout trouvé : Schnickeon, le favori de Commode, celui qui prenait ses consignes du fils de l’empereur et faisait tout pour grader sa place auprès du futur héritier. Marc Aurèle montra là sa fine connaissance de la politique romaine, en n’agissant pas de manière frontale. Inculper Schnickeon aurait signifié discréditer Commode, or l’empereur semblait persister dans sa volonté de mettre sur le trône son fils, qu’il se révèle un incapable, un intrigant ou un assassin. L’homme vieillissant s’était mis des ornières, considérant que la légitimité de ses successeurs était la seule à même d’éviter de funestes écarts, comme avait pu l’être la rébellion du général Cassius.

Le lendemain de l’entrevue entre Venitius Varron et Marc Aurèle, une accusation insistante filtrait des palais du Palatin, mettant en cause le passé de Schnickeon et l’enrichissement démesuré fait sur le dos de l’Empereur et de ses sujets. Il était monnaie courante que des proches des empereurs s’enrichissent ainsi, et on gardait encore à l’esprit les fortunes démesurées des plus connus, comme Sénèque et ses 300 millions de sesterces, un siècle plus tôt. Schnickeon n’avait pu faire une telle razzia sur le trésor, mais les premières estimations parlaient d’une fortune acquise de plus de 40 millions, une somme scandaleuse sachant l’état de dénuement dans lequel était arrivé le proxènete grec 2 ans plus tôt.

Marc Aurèle pressa alors Commode de mettre un terme à la rumeur qui enflait et qu’il avait sciemment initié dans l’un des bureaux de travail de son palais. Son fils, qui perdait contenance de jour en jour, se sépara alors de Schnickeon et l’on vit se dernier, un matin, quitter la colline du Palatin avec or et bagages, amenant avec lui un nombre impressionnant de partisans qui s’étaient trop longtemps mouillé à ses côtés pour rester à la Cour une fois sa disgrâce venue. La procession se délita néanmoins rapidement, les courtisans s’égayant comme des moineaux pour fuir Rome et le destin fatal qui devait certainement frapper Schnickeon. Ce dernier se retrouva rapidement seul, flanqué seulement de quelques hommes de main, avec l’interdiction de quitter la ville le temps qu’une enquête se penche sur ses agissements.



La procession quitte le Palatin ? Hop, un regard derriére, on est pas sur de revenir ...


Des fenêtres de sa suite, Perennis avait du assister avec délice au départ de son rival. Schnickeon écarté, et avec son fils Chal dans les draps de Commode, Perennis s’était offert la place de favori et les espérances qui allaient avec.
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  #9  
Vieux 29/06/2008, 19h59
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Chapitre 13 : Où Otto reçoit un invité peu orthodoxe



Au bout de quelques semaines, Rome bruissait encore de l’humiliation infligée à Schnickeon, tandis que la multitude, l’échine courbée, se pressait autour de Perennis, espérant ainsi s’attirer les grâces du nouvel homme fort de Commode. Le peuple ne s’était pas trompé, depuis sa nomination comme Consul, Commode s’exerçait à ce qui serait bientôt sa future tâche. Comme en retrait, son père Marc Aurèle consacrait tout son temps à l’écriture de ses mémoires, semblant se désintéresser de ce qui se passait dans l’Empire. Et pourtant les nouvelles semblaient alarmantes de tous les côtés : les Parthes semblaient vouloir de nouveau faire ingérence dans le gouvernement proromain mis en place en Arménie, tandis que les barbares refluaient de nouveau sur les rives du Danube, après seulement quelques années de paix.
Tout cela me laissait de marbre. J’avais même complètement évacué de mon esprit le souvenir de Schnickeon et le chantage qu’il exerçait sur moi. Je ne songeai qu’à Coelius, dont je n’avais plus de nouvelles depuis plusieurs mois, depuis qu’il était parti en Palestine pour retrouver la trace de mon frère Chazam. J’envoyais chaque semaine un serviteur au domicile de Coelius, espérant chaque fois obtenir des nouvelles… il n’y en avait jamais. La femme de Coelius, BenArtistim, était morte d’inquiétude, tant pour son mari que pour son fils, Jmlus, qui avait accompagné son père dans son périple. Pour le former, avait-il dit, mais je commençais à penser qu’il avait mal évalué l’éventuel danger du voyage.

La vie à Rome continuait son lent cheminement, semblant éviter les aléas de ce qui se passait tout autour. Nous fûmes les derniers à entendre parler d’une épidémie de peste qui s’étendait à travers l’Egypte et menaçait, en emportant tous les travailleurs de la région, l’approvisionnement en blé de la capitale. Nous fûmes également les derniers à apprendre la recrudescence de violence qui touchait la Palestine et qui n’était pas du, cette fois, aux Juifs, mais aux Chrétiens.

Une nuit, un serviteur vint me réveiller pour m’annoncer qu’un visiteur tambourinait à la porte de l’insula. Mes hommes avaient beau avoir menacé de l’assommer si c’était le seul moyen pour le faire taire, il insistait pour me voir et affirmait que je le connaissais. Il n’avait bien entendu pas divulgué son nom.

Je passais une dague à mon côté et demandais à mes hommes de fouiller le visiteur, et de se tenir prêt à intervenir s’il se révélait dangereux. Cette manière si brusque de me tirer de mon sommeil était certainement signée Schnickeon.
Tandis que j’attendais dans le patio, sous la surveillance d’un serviteur, le visiteur entrait et, une fois assurée de son inoffensivité, se présentait à moi. Il semblait bien trop menu et trop petit pour être Schnickeon, mais il pouvait toujours s’agir de l’un de ses hommes. Quand je pu distinguer son visage, à la lumière d’une torche, je me rendais compte qu’il s’agissait non d’un enfant, certes, mais d’un adolescent, qui ne m’était pas inconnu. Et cette chevelure … je me jetais aussitôt sur lui, maintenant que j’avais reconnu Jmlus, le fils de Lucius Coelius. Le garçon s’était épaissi et avait gagné en stature, on pouvait déjà deviner l’homme qu’il serait plus tard. Son visage était presque noir, de poussière peut être, ou d’une année passée sous le soleil brûlant de l’Orient. Son regard, surtout, s’était affirmé, et j’y distinguais des éclats de dureté .Il était loin, l’enfant aux yeux papillonnant qui ne pouvait détacher son regard du Triomphe organisé un an plus tôt …
Si sa voix, qui terminait tout juste de muer, décrocha chez moi un sourire instinctif, les nouvelles qu’il m’apportait m’étourdirent au point que je dus m’asseoir pour encaisser toute l’histoire.

Coelius avait donc embarqué à Ostie avec Jmlus, et tous deux avaient vogué d’abord jusqu’au Pirée, afin de suivre le chemin exact de Chazam à son départ de Grèce. La situation sur place s’était dégradée, et la quasi totalité des apprentis de Chazam avaient abandonné le navire avant la faillite qui était inéluctable. Ils avaient ensuite accosté à Césarée, en Judée Samarie, et remonté le chemin jusqu’à Jérusalem, là où sa trace s’était perdue. Si Coelius avait rapidement compris qu’aucun négociant n’avait jamais vu Chazam sur place, il lui avait fallu des trésors d’ingéniosités pour dépasser les problèmes de la langue, de la religion et des cultures différentes pour progresser dans son enquête. Les résultats étaient là, épouvantables : Chazam était bien en vie, certes, mais son penchant déjà prégnant pour la liberté face au poids du monde romain l’avait fait franchir le Rubicon : plongé dans un monde étrange, dans un vaste chaudron de cultures cosmopolites se réclamant toutes bien plus anciennes que les Romains et même les Grecs, Chazam avait fait office d’éponge, emmagasinant toute la rébellion du monde oriental. Se voulant tout d’abord Juif, quand il avait contemplé les restes du dernier temple détruit à Jérusalem, il avait ensuite été conquis par le christianisme, y voyant certainement un exutoire à son rejet de Rome.



Rejeter Rome, c'est rejeter tous les bienfaits de l'humanité ...


Tandis que la gorge nouée, je réclamais à l’un des serviteurs une coupe de vin, que je coupais d’eau avant de la boire d’une traite, Jmlus allait de révélation en révélation. Effectivement la colère grondait en Palestine, où les Chrétiens avaient décidé de partir en guerre contre la moralité romaine. Cela ne devait pas m’étonner, connaissant le caractère aventureux de mon frère, mais c’était bien Chazam qui avait pris les rênes du mouvement, n’hésitant pas à appeler à l’insurrection contre Rome. Quelques crucifixions avaient remis de l’ordre sur place, et Chazam s’était enfuit, décidé à apporter la graine de la rébellion non plus aux marches de l’empire, mais au centre même.

Je m’exclamais aussitôt et interrompais le récit de Jmlus.

-Tu veux dire que mon frère est ici ? A Rome ?
-Non, il a repris un autre bateau à destination de Massilia, et il souhaite remonter ensuite jusqu’à Lugdunum.

J’étais complètement décontenancé. Qu’allait bien pouvoir faire mon frère en Gaule, et quel était le rapport avec sa nouvelle foi ?
Jmlus sembla saisir mon incompréhension et me glissa :

-Tu sais, je les ai entendu parler, et je pense qu’ils veulent se faire soulever les Gaules…

L’idée était grotesque, et je n’osai imaginer dans quel délire obscurantiste avait bien pu tomber Chazam. La Gaule avait été conquise 250 ans plus tôt, et la romanisation y avait été excellente. Tous les aqueducs de Rome pouvaient s’effondrer avant que la Gaule ne fasse sédition comme une quelconque province d’Asie.


Les futures pentes de la Croix-Rousse, surplombant Lyon, capitale des Gaules

Mais en y réfléchissant, l’idée n’était pas si ridicule, vu la place prépondérante qu’avait prise la Gaule dans l’économie romaine. Des révoltes en Arménie ou en Egypte étaient une chose, les menaces que pouvaient exercer les Barbares sur le Danube et les Gaulois de l’autre côté des Alpes en était une autre, bien plus grave, et menaçant directement Rome.
Mais qu’est-ce qui avait bien pu passer par la tête de Chazam ? J’étais atterré par cet histoire de conversion, tant les rites chrétiens nous faisaient horreur. J’avais entendu dire que chaque nouveau membre devait planter un poignard dans une épaisse couche de farine, dans laquelle était caché un nouveau né. C’était par cet acte ignoble que les Chrétiens croissaient, dans la culpabilité de chaque nouveau membre devenu un meurtrier de la pire espèce. Soudainement, je tiquais sur ce que venais de dire Jmlus.

-Tu dis que tu les as entendu parlé… de qui s’agissait-il ?
-Hé bien… de Chazam, et de mon père, entre autres ! me répondit Jmlus, en toute innocence.

Je tendais mon verre pour le remplir de nouveau, mais mes doigts tremblaient tellement que le verre m’échappa et se brisa sur le sol en mosaïques.

-Ton père… mais pourquoi va-t-il en Gaule ?
-Mais parce qu’il accompagne Chazam, tout simplement !

Et Jmlus de faire un mouvement d’épaules hautain, comme si tout allait de soi. J’eus soudainement envie de baffer ce mioche débile, qui semblait me prendre pour un crétin et en disait bien moins qu’il n’en savait. Je serrais les poings, et tentait de garder mon calme.


Sale gosse ! Une grosse tignasse cachant une tête creuse !

-Mais dis moi… tout cela a encore un rapport avec l’enquête que j’ai confié à ton père ?

Jmlus leva les yeux au ciel, avant de m’achever :

-Non, il y va car il croit en Chazam, tout simplement !

Tandis que j’étranglais mentalement Jmlus et ses « tout simplement », je réalisais avec horreur que les conversions chrétiennes étaient en marche : j’en avais un exemple devant moi.
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  #10  
Vieux 29/06/2008, 20h30
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En fait, c'est plus un AAR, c'est une histoire , et très bonne de surcroit
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