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Vieux 05/02/2007, 10h26
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Par défaut Wright et les jeux de gestions

by JOHN SEABROOK
Traduction de : Lumpy de Sporemania.com
Malgrè sa longueur cet article donne une idée sur Will Wright et ce qu'il désire faire .




Will Wright a changé le concept du jeu vidéo avec les Sims.

Peut-il recommencer avec Spore ?






En 1972, un ingénieur et ancien forain, nommé Nolan Bushnell, lança une compagnie de jeu vidéo, à Santa-Clara en Californie. En tant qu’élève ingénieur à l’université de l’Utah dans les années 1960, Bushnell est devenu obsédé par un vieux jeu appelé Spacewar. Les développeurs du jeu, un groupe d’élèves diplômés qui faisaient parti du Railroad Club du M.I.T -- une jeune communauté de hackers -- n’avaient jamais envisagé de vendre des jeux. Leur idée était de démontrer l’intérêt de l’interactivité, et de faire un petit pas vers la simulation d’une intelligence artificielle sur un ordinateur. L’ambition de Bushnell évoluait plus sur le long terme. Il voulait créer des jeux sur des machines payantes et les vendre à une salle de jeux. Il avait prévu un nouveau genre d’animation, dans lequel l‘animé serait dans la machine. « J’ai appris des choses sur comment vous faire dépenser de l’argent pour moi sur un de mes jeux », plus tard il a rajouté « Je met ce que j’ai appris sur ma machine automatique. » De son mariage improbable – les ordinateurs et le carnaval – l’industrie du jeu vidéo était née.

Le premier produit de la compagnie Bushnell, Atari, était Pong, un jeu simple et élégant dans lequel deux joueurs manipules des plateformes électroniques et envoient une balle faire des allers et retours à travers un écran noir et blanc. Le jeu avait deux composants de bases. C’était de la simulation d’une table de ping pong, arrivant à fournir la plus part des règles du jeu, structurée et logique à l’écran. Et c’était une animation – une image en mouvement créée pour utiliser la persistance rétinienne, le cerveau et les doigts sur les manettes. Le design du jeu fut créé par un ancien footballeur américain des All-State du nom de Al Alcorn, qui était le second employé d’Atari. Comme Heather Chaplin et Aaron Ruby en raconte l’histoire dans « Smartbomb », leur nouveau livre sur l’histoire de l’industrie, Bushnell a lancé le jeu Pong fait main à la taverne d’Andy Capp, près de Sunnyvale et quelques mois plus tard, des files d’attentes se créaient à l’extérieur du bar le matin avant l’ouverture pour y jouer. Quand arriva 1974, Pong était allé jusqu’à une petite pizzeria à Hanover, dans le New Hampshire, où j’y ai joué, et pour le reste de cet été mon désir le plus profond était d’y retourner pour pouvoir y rejouer.

Les jeux qui suivirent Pong – Space Invaders, Asteroids, Missile Command et Pac-Man, parmi d’autres - étaient encore plus captivant, mais les simulations restaient du domaine des salles de jeux : le sport, les aliens, les zombies, les jeux de shoot. Aux alentours de 1980, comme la vitesse et la capacité de stockage des ordinateurs et des jeux augmentaient, les designers ont continué à améliorer l’esthétique. Le côté simulation des jeux, toutefois, n’égala jamais la vieille ambition du Railroad Club de reproduire la vraie vie sur écran. Le jeu le plus vendu cette année là fut Madden NFL, dans lequel vous pouvez jouer au football américain en incarnant une star. Madden NFL était une simulation beaucoup plus sophistiquée que Pong ne l’était mais le contenu du jeu n’était pas plus proche de la vraie vie.

A la fin des années 80, un nouveau type de jeu vidéo a doucement émergé -- les jeux genre Dieu. Les animations sur ordinateurs correspondent au lourd projet de convertir un art graphique en pixels à deux dimensions, et, plus récemment, en un polygone à trois dimensions, les blocs de construction des images digitales. Mais de créer une simulation vraiment absorbante, une qui offre un aperçu dans la nature de la vraie vie, est un problème beaucoup plus difficile. Le designer doit jouer à Dieu, ou du moins la notion de Dieu dans « Les consolation de la philosophie » de Boethius -- un Dieu qui peut anticiper l’avenir des actions du joueur tout en permettant au joueur d’expérimenter la libre volonté.

Parmi les pionniers des jeux genre Dieu, on peut citer Peter Molyneux de Grande Bretagne qui a créé Populous en 1989. Ce jeu donne au joueur un pouvoir omniscient sur une variété de sociétés simulées. (Vous pouvez les aider ou les torturer autant que vous le désirez, toutefois vos actions ont des conséquences dans le jeu). Un autre designer important de jeu genre Dieu est Sid Meier, qui a fondé la série des civilisations, qui ont commencé à apparaître en 1991, sur des faits historiques, comme la découverte scientifique, la guerre ou la diplomatie. Mais le maître du genre – le Dieu des jeux de Dieu – est Will Wright. Ayant commencé en 1989 avec SimCity, dans lequel l’objectif est de créer, de gérer une ville moderne, puis en continuant avec les Sims en 2000 où vous prenez soin d’une famille dans un environnement urbain ordinaire, Wright a créé des situations qui redéfinissent les limites de ce que peut être un jeu. « Cela m’est venu à l’esprit que la plupart des livres ou des films tendent à être à propos de situations réalistes » a-t-il dit « Pourquoi les jeux ne devraient-ils pas ? » Pour les designers de jeux vidéo, Wright est le Zola de la forme : l’homme qui a bougé, la matière de ses jeux est loin des mythes et de la violence mais plus vers la vie sociale ordinaire.

Pendant les six dernières années, Wright a travaillé sur un nouveau jeu, qui sortira en 2007. Il est attendu avec le même intérêt que les écrivains ont attendus « Ulysses » de Joyce dans les années 20. Au début, Wright a appelé son projet Tout Sim, mais, il y a quelques années il s’est arrêté sur le nom de Spore. Le jeu retrace la théorie de la sélection naturelle. Il cherche à copier l’algorithme des conditions par lesquelles l’évolution fonctionne, et de rendre ce processus comme un jeu. Conceptuellement, Spore est radical : à une époque où la plupart des créateurs de jeux offrent des graphiques, des scénarios et des histoires de plus en plus éclatants, Wright et ses alliés, Electronic Arts, font le pari que les joueurs veulent créer leurs propres environnements et leurs propres histoires – que ce que les joueurs aiment vraiment avec les jeux c’est explorer ce que Wright appelle « l’espace du possible ». « Will a une distorsion de la réalité qui l’entoure », m’a dit son ancien partenaire de travail, Jeff Braun. « Il arrive avec l’idée la plus folle que vous ayez jamais entendu, et quand il a fini de vous expliquer, le monde parait fou – il est la seule personne censée y habitant »





Le bureau de Wright est au coin de six immeubles à quelques rues de San Francisco Bay à Emeryville en Californie. Il a un balcon où il peut fumer. Les murs sont recouverts de dessins au marker, portant des messages cachés comme « Star Map Issues ». Wright qui a 46 ans, est grand et maigre, avec un visage long et étroit et des doigts minces. Il s’habille plus ou moins avec les mêmes habits chaque jour – des tennis noires New Balance, des jeans noirs délavés, une chemise déboutonnée, une veste en cuir et des grosses lunettes style aviateur. Sa peau est luisante et marron rougeâtre, comme une peau de fumeur peut l’être – à moitié bronzé. Il a parfois une vague moustache et barbiche. Vous n’avez pas vraiment de conversation avec lui, vous mentionnez une idée et cela génère dans son esprit cinq ou dix associations, ce qu’il débite en de rapide élans de données raccordés par des « hum ».

Quand je suis entré dans son bureau, Wright s’est levé d’un bond et, après m’avoir serré la main, a dit « Tenez, essayez ça, hum, c’est vraiment un jouet génial que j’ai découvert récemment », et m’a donné une manette sans fil pour contrôler un tank robotique qui était sur le sol. Je faisais face à un autre tank, que Wright contrôlait. Il a commencé à bouger son tank, tirant sur le mien, me regardant avec curiosité, attendant de voir combien de temps il me faudrait pour comprendre ce qui se passait. J’ai senti une étrange sensation de picotement dans mes mains, mais je n’y ai pas fait attention au début. Finalement, j’ai réalisé que je prenais des décharges : chaque fois que le tank de Wright me tirait dessus, une décharge électrique passait de la manette à mes mains.

Wright était en train de travailler sur une présentation Power-Point d’un discours qu’on lui a demandé de donner à propos de Spore. « C’est supposé être sur comment m’est venu l’idée du jeu, mais ce dont j’ai vraiment envie de parler c’est de l’histoire de l’astrobiologie, alors je fais les deux. » Il est allé jusqu’aux deux ordinateur dans son bureau et a cliqué, faisant défiler quelques images, tout en décrivant la structure de Spore. Au début, j’étais perplexe. Jusqu’à présent dans sa carrière, Wright a inclus de plus en plus de réalité sociale dans ses jeux. Mais Spore est une surprise – au premier coup d’œil, cela ressemble à un jeu plutôt « cartoons d’insectes», comme l’a écrit un site Web sur les jeux. Les bâtiments n’ont pas les formes urbaines et droites de SimCity ; ils ressemblent plus à de l’architecture venant des livres de Dr Seuss. Wright a aussi présenté les armes et les quêtes. La violence n’est pas gratuite – dans certains cas, vous devez tuer pour survivre – mais ce n’est pas tout en sucre non plus. Non seulement on tue des créatures dans Spore mais on doit aussi les manger.

Au premier niveau du jeu, vous incarnez une unique cellule dans une goutte d’eau, ce qui est représenté sur l’écran comme un environnement en 2D, comme une tranche sous un microscope. En évitant avec succès les prédateurs, qui représentent des cellules de différentes couleurs, vous pouvez vous reproduire, et cela vous donne droit à des points d’ADN (une double hélice apparaît au dessus de votre personnage). L’ADN est la monnaie dans les plus bas niveau de Spore, et, à mesure que vous évoluez vous pouvez obtenir de meilleurs membres – de plus grandes nageoires pour nager plus vite, ou des griffes plus aiguisée pour vaincre les prédateurs. Finalement, vous émergez de l’eau dans le second niveau – terre sèche – et votre créature est en compétition avec les autres, et doit s’accoupler avec ceux de son espèce que l’ordinateur génère, jusqu’à ce que vous formiez une tribu. Vous pouvez en faire un jeu violent avec des conquêtes des autres tribus ou vous pouvez faire du social. Si vous faîtes les bons choix, en accord avec la logique de simulation, vous survivrez et continuerez d’évoluer. Le long du chemin, vous obtiendrez des armes et des outils plus puissants, vous créerez des habitations, des villages et des villes. Quand votre ville a conquis les autres dans votre monde, vous pouvez construire un vaisseau spatial et l’envoyer dans l’espace. Au moment du niveau final, vous aurez évolué en un Dieu intergalactique qui peut voyager à travers l’univers répandant la diplomatie ou la guerre interstellaire.

Les images que Wright a récupérées de l’ordinateur étaient censées illustrer le jeu, mais elles ne donnaient que peu de sens à ce que cela allait être. Il y en avait une qui montrait l’équation de la gravité, une image sur la théorie de panspermie (l’idée que la vie sur Terre a commencé avec une vie organique apporté de l’espace par les comètes et autres « boules de neiges »), et une image d’un programme TV des années 80 « The Dukes of Hazzard ». Wright s’est arrêté pour dire que, d’après ses estimations, basées sur la vitesse des ondes radio, cent cinquante étoiles avaient maintenant reçu « The Dukes of Hazzard ».

Spore n’est pas un jeu multi joueurs, comme l’immensément populaire World of Warcraft, qui tourne sur des ordinateurs « massivement parallèles » (un système distribué utilisant beaucoup d’ordinateurs en réseau) ; c’est ce que Wright, en plaisantant a appelé le massivement parallèle pour un jeu simple joueur. Si vous avez Internet, le serveur de Spore « pollinisera » votre copie du jeu avec du contenu créé par d’autres joueurs. Pour créer le meilleur contenu en accord avec votre style de jeu – « le meilleur écosystème pour votre créature » comme Wright le dit – Spore conçoit un modèle de votre manière de jouer au jeu, et cherche le contenu d’autres joueurs pour coller avec ce modèle. Si vous créez un monstre Darwinien hyper agressif, par exemple, le jeu téléchargera probablement des opposants sanguinaires pour vous tester. En d’autres mots, pendant que vous jouez au jeu, le jeu joue à vous.

Wright m’a demandé si je voulais essayer l’éditeur de créature de Spore, qui est l’outil principal de création dans le jeu. Sur l’écran, une forme floue en forme de rein qui ressemble à la tête de Mr Patate avant que vous n’ajoutiez les différentes parties. Wright m’a montré les menus pour créer le squelette de ma créature, le corps, les yeux et la peau. J’ai utilisé la souris pour étirer la forme en un torse, changeant de forme et de longueur de colonne vertébrale.

J’ai choisi des parties sur le côté gauche de l’écran – nageoires, becs, jambes à trois pattes – tout cela coûtant des points d’ADN à ce stade du jeu. Wright m’a expliqué : « Vous pouvez choisir différentes bouches – carnivore, herbivore, omnivore – qui déterminera non seulement comment vous mangerez, mais aussi la voix que possèdera votre créature. » Sur la droite de l’écran, des graphiques montrent les avantages et conséquences de chaque choix – vitesse, puissance, camouflage, etc. Basculant sur le menu des textures, j’ai appliqué un manteau basique de violet, puis quelques bandes oranges ; l’ordinateur a automatiquement ombré les couleurs pour que la peau de ma créature ait l’air d’avoir été faite par un professionnel.

« OK, maintenant, allons dans le mode test » a dit Wright.

J’ai cliqué sur un bouton et ma créature s’est réveillée et a commencé à déambuler sur l’écran. C’était une chose un peu goofy, un hamster apatosaure avec une bedaine, un long cou et des oreilles pendantes de chien. Mais elle était entièrement animée. Quelque chose que Pixar aurait pu créer, je l’ai fait en trois minutes à peu près, je me suis senti comme si je jouais avec de l’argile digital.




Electronic Arts est le plus grand producteur de jeux vidéo dans le monde, avec plus de sept mille employés et des studios en Amérique du Nord, en Europe et en Asie. Il crée ou met une licence sur beaucoup de jeux de plateforme, incluant les jeux PC et Mac ; les consoles pour Nintendo, Sony et Microsoft ; les jeux portatifs pour la GameBoy de Nintendo (et de la nouvelle Nintendo DS) et pour la PSP de Sony ; et les jeux on-line pour jouer sur le Web. Plus récemment, EA a commencé a faire des « jeux mobiles », pour jouer sur les téléphones portables, un marché nouveau et en plein essor.

EA fut fondé en 1982 par Trip Hawkins, un ancien manager en marketing chez Apple, comme « le nouveau Hollywood », et au début, il était supposé être un refuge pour les auteurs de jeux vidéos. Hawkins a proposé de traiter les designers, qui avaient jusqu’alors été perçu comme de simples ingénieurs, comme des artistes, et de créer des emballages sexy qui évoqueraient les couvertures d’albums, avec le nom des créateurs mis sur le devant. « Un jeu vidéo peut-il vous faire pleurer ? » était l’un des premiers challenge de la compagnie. Au fil des années, EA a modifié sa stratégie à l’égard des jeux, se basant sur le « contenu prouvé » -- mettre des licence sur des histoires, des personnages de film, du sport et la TV, mis en forme dans les jeux. (Plus récemment, elle s’est concentrée sur la création de sa propre propriété intellectuelle.). EA a aussi développé des jeux de simulation sportive, basés sur des professionnels du sport, représentant les joueurs eux même. Comme Steven L. Kent le relate dans « L’ultime histoire des jeux vidéo », cela a commencé en 1984, avec le DR J et Larry Bird Go One-on-One, un jeu de basket pour lequel EA a payé Ervig et Bird pour utiliser leurs noms et images. Depuis lors, EA a créé un empire des jeux de sport. La dernière version de Madden NFL, qui a originellement été publié en 1990, s’est vendue à deux millions d’exemplaires la première semaine de sa sortie en Août dernier. Ces dernières années, la compagnie a obtenue une réputation à la Microsoft pour ses pratiques assez dures de business – achetant de petits studios de développement qui ne peuvent plus financer la montée des prix pour la production de jeux vidéo, et fermant la porte aux autres concurrents avec des contrats aux licences exclusives.

Le campus de EA est à Redwood Shores en Californie, à la frontière Nord de la Silicon Valley. Les employés s’habillent en short, il y a une salle de gym ; les jeux dans la compagnie sont à moins de moitié prix ; et beaucoup de salles de réunions sont conçues pour ressembler à des bars de sport. Mais selon deux employés poursuivis pour « non paiement avec date limite », remplis par des designers et des programmeurs, travailler pour EA n’a pas toujours été aussi sympa qu’il n’y parait. Malgré le fait que les poursuites ont été arrêtées et que EA a revu sa politique sur le retard, faire 80 heures par semaine reste la norme.

Pendant que j’étais chez EA, on m’a fait une démonstration de The Godfather, un des nouveaux jeux de la compagnie. Vous commencez à un bas niveau de criminalité et espérez devenir, à travers l’utilisation intelligente de la violence et de l’extorsion, à la tête de la famille du crime. Une des innovations du jeu est que en complément de tuer des gens, vous pouvez aussi les blesser en leur tirant dans les rotules ou les épaules -- et si vous les blessez seulement, vous pouvez encore leur extraire de l’argent, et donc avancer dans le jeu. J’ai aussi vu le dernier opus de la franchise Tiger Woods. Le golfeur a autorisé EA à rajouter des capteurs de mouvements sur son corps et son visage, et les données graphiques étaient rendues sur ordinateurs. Le résultat est, parmi pas mal d’autres choses, une version remarquable d’animation du fameux sourire de Woods – la façon dont la lèvre supérieure remonte sur les dents est parfaite.

Après les démos, j’ai rencontré Larry Probst, le PDG de 56 ans de EA, qui a commencé dans le département des ventes en 1984. Probst m’a expliqué que EA autorisait Wright à former une équipe de développeurs en choisissant parmi les artistes et développeurs les plus talentueux chez EA. La compagnie a également construit un quartier général à part pour 75 membres de l’équipe à Emerville, à environ 50 miles au nord de leur campus, près de Orinda, où Wright a vécu. Elle compte sur Spore pour l’aider à redresser ses comptes. L’action chez EA a chuté de presque 30% depuis Avril, et ses ventes étaient 20% plus basses que l’année précédente. Probst a tenu l’un des cycles en baisse qui frappe l’industrie des jeux vidéo tous les quatre ou cinq ans pour responsable des problèmes de la compagnie. Ces cycles surviennent quand une nouvelle génération de consoles devient disponible ; cet automne, à la fois la PlayStation 3 de Sony et la Wii de Nintendo sera en vente. Traditionnellement, les joueurs arrêtent d’acheter la version courante des jeux en anticipation de ceux qui seront développés pour les nouvelles consoles.



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Mais il y a des raisons de penser que les problèmes de EA sont plus systémiques (ndlr : Qui concerne l'organisme dans son ensemble.) – effectivement, l’ensemble de l’industrie du jeu vidéo est sur le point de se restructurer fondamentalement. Le futur n’a jamais été aussi incertain depuis le début des années 80, quand le jeu vidéo commençait à évoluer du simple amusement dans les salles de jeux, vers les maisons. Même si chaque génération de matériel informatique offre la capacité d’augmenter la qualité graphique – comme le sourire de Tiger – cela requiert aussi que les producteurs de jeux vidéo passent plus de temps pour remplir cette capacité. Il y a vingt ans, c’était possible pour un seul homme de créer un jeux vidéo entier ; aujourd’hui, une équipe de développeurs de 100 ou plus est dans la norme. De plus, le produit de base de EA, qui est un jeu de boxe coûtant aux environs de 50$, n’est plus aussi attractif qu’il ne l’était. Beaucoup d’adultes préfèrent les jeux « occasionnels », qui peuvent être joués sur le téléphone portable et sur de courtes sessions on-line. A la place d’acheter des jeux en magasins et de les ramener à la maison, les clients veulent des jeux qu’ils peuvent avoir sur le Web. Tout comme certains dans l’industrie des films ont commencé à se poser des questions sur la faisabilité économique de films coûtant jusqu’à 50 millions de dollars à produire, les gens dans l’industrie du jeu vidéo se demandent si les jeux à gros budget peuvent survivre dans un climat qui favorise les jeux téléchargeables, qui sont bon marché, courts et que l’on utilise qu’une seule fois.

Pendant notre conversation, Probst m’a semblé plus enthousiaste pour le marché des jeux «occasionnels», spécialement pour les jeux sur téléphone portable, qui a fait gagné à EA plus de 100 million de dollars l’année dernière. « Pensez à ce qui se passe quand 3 milliards de chinois ont un téléphone portable » a-t-il dit au bout d’un moment. Mais comment convaincre les joueurs occasionnels, qui cherchent juste une distraction, à jouer à un jeu qui retrace l’évolution, la construction de villes, la conquête et le voyage interstellaire ? J’ai demandé cela à Probst et il m’a dit « Vous dîtes aux gens que c’est un jeu de Will Wright »




Wright appartient à la dernière génération de designers de jeux (et donc d’être humain) qui ont été élevé avant que les ordinateurs personnels ou les consoles n’existent. Il construisait des maquettes étant enfant : « des bateaux, des voitures, des avions – j’adorait faire ça », m’a-t-il dit. Quand Will eut 10 ans, il a construit une réplique du pont d’envol de l’Enterprise, qui a gagné un award à la convention de Star Trek. Il adorait aussi les jeux de sociétés fabriqués par Avalon Hill, comme PanzerBlits, un jeu de stratégie basé sur la guerre de tanks sur le front de l’Est.

Le père de Wright, Will Senior, et son grand-père ont été diplômés à l’école d’ingénieurs de Georgia Tech, et Wright garde leurs diplômes sur un mur de sa maison, à côté d’une photo de lui. Ses aïeux sont des hommes en costumes brossés, sur le point de s’embarquer dans des carrières à succès en faisant des choses utiles. Et puis, il y a Will Junior qui n’a jamais été diplômé de l’université, et qui ne cadrait pas avec la tradition familiale – un homme dégingandé avec un sourire gentil. « Quelque chose a mal tourné avec celui-ci » m’a dit Wright, scrutant la photo.

Dans les années 60, le père de Wright a développé un nouveau moyen de faire des matériaux d’emballages en plastique et a démarré une entreprise à succès, ce qui a permit aux Wrights de vivre confortablement à Atlanta. Le père de Will était aussi un excellent golfeur. Sa mère, Beverlye Wright Edwards, était une magicienne et actrice amatrice. Wright a grandi à l’école locale de Montessori, avec son emphase sur la créativité, la résolution de problèmes et la motivation de soi. « Montessori m’a appris la joie de la découverte » Wright m’a dit. « Cela nous montre que l’on peut devenir intéressé dans des théories assez complexes, comme la théorie de Pythagore, disons, en manipulant des blocs. C’est basé sur son propre apprentissage, plutôt qu’avec un professeur vous expliquant des trucs. SimCity vient tout droit de Montessori – si vous donnez aux gens ce modèle pour construire des villes, ils en tireront les règles de l’urbanisme ».

Les soirs, Wright et son père s’asseyaient sur le porche et parlaient des étoiles, du programme Apollo de la NASA, et de la possibilité de la vie sur d’autres planètes. Wright voulait être astronaute, et son but était de créer des colonies dans l’espace qui aideraient à diminuer la pression de la surpopulation. Son père pensait que c’était une idée merveilleuse.

Quand Will eut 9 ans, son père mourut d’une leucémie, et sa mère le ramena lui et sa sœur Withney, à Baton Rouge, sa ville natale. Will est allé à Episcopal, une école primaire privée.

Il ne l’a pas autant aimé que l’école de Montessori, même si il appréciait les discussions sur Dieu avec la faculté. « C’est ici que je suis devenu athée ». Il commença à l’université de l’état de Louisiane quand il avait 16 ans, deux années plus tard, il fut transféré à Louisiana Tech. Il excella uniquement dans les matières qui l’intéressaient : architecture, économie, ingénierie mécanique, histoire militaire. Il avait des objectifs impraticables – en plus de commencer des colonies dans l’espace, il voulait construire des robots. Il laissa tomber après deux ans, conduisit des bulldozers pour l’été, et puis, à l’automne 1980, entra dans une nouvelle école à Manhattan, où il étudia la robotique. Il vivait dans un appartement au dessus d’un restaurant Balducci, au Village de Greenwich, et passait beaucoup de temps à Canal Street quémandant des parties du surplus de magasins électroniques, qu’ils utilisaient pour tracer les routes, pour fabriquer un bras robotique.

Au printemps 1981, Wright répondit à une annonce dans un magasine de voiture : Richard Doherty, un rallye lover, cherchait des participants pour concourir sur une course à étapes entre Farmingdale, Long Island et Redondo Beach, Californie. Wright avait une Mazda RX-7, que lui et Doherty ont modifiée avec un plus grand réservoir. Ils portaient des lunettes pour la vision de nuit pour pouvoir conduire vite dans le noir sans phares et éviter les flics. « Will a dit que nous devrions prendre la route du sud, même si elle était plus longue, parce que si on se faisait arrêter, il pourrait parler aux flics » Doherty m’a dit. « On s’est fait arrêter en Georgie. On faisait du 120 miles à l’heure sans phares, mais Will n’a pas mis plus de quelques minutes pour montrer à l’officier pourquoi il devait nous laisser partir sans amende » Ils ont gagné la course, établissant un nouveau record de 34 heures et 9 minutes.

Après un an à sa nouvelle école, Wright est retourné à Baton Rouge pour vivre avec son meilleur ami. Sa famille attendait de lui qu’il reprenne la compagnie de plastique mais Will n’était pas intéressé. (Finalement il a vendu l’affaire). Rendre les voitures plus puissantes pour les courses de rallye était sa passion principale cet été jusqu’à ce que la colocataire de sa sœur, Joell Jones, ne vienne à Baton Rouge pour une visite. Jones était 11 ans plus vieille que Wright, leurs familles étaient amis et il la connaissait depuis qu’il était adolescent. Maintenant elle vivait à Oakland, où elle était peintre et une activiste sociale. Elle revenait à Baton Rouge pour récupérer après avoir eu un nerf sectionné au poignet. Pour améliorer la capacité de mouvement dans sa main, Wright construisit une pièce de métal et de bande en caoutchouc. « Will me parlait passionnément de la nécessité de coloniser l’espace, et je lui répondais que c’était plus important de nourrir les gens sur la Terre », Jones me raconta. « D’une manière ou d’une autre nous sommes tombés amoureux ». Quand Jones retourna à Oakland, Wright demanda s’il pouvait venir et vivre avec elle, elle accepta, à condition qu’il n’interférerait pas quand elle peignait. Ils se marièrent en 1984.




Au début des années 80, les machines à jeton ont commencé à décliner en popularité et les jeux vidéo ont pris le pas. Atari, qui avait popularisé les consoles de salon fut supplanté par Nintendo, une vénérable compagnie Japonaise, avec son Nintendo Entertainment System.

En tant que matériel informatique, la NES était une amélioration par rapport aux machines Atari (le joystick d’Atari fut remplacé par la manette directionnelle « + », que le joueur utilisait avec le pouce), mais c’était le software, sous la forme d’un jeu Nintendo en cartouche appelé Super Mario Bross, qui a fait de Nintendo l’industrie leader. Shigeru Miyamoto, qui avait conçu Donkey Kong de Nintendo pour les jeux d’arcades, a revu le jeu, changeant le charpentier, qui s’appelait Jumpman, en un plombier au nom de Mario, et lui ajoutant un frère appelé Luigi et une collection plus complète d’aides (des pièces d’or, des champignons magiques), des obstacles (des ennemies crachant du feu), et des passages souterrains, tiré en grande partie de son enfance passé à explorer les grottes des montagnes près de sa maison à Sonobe.

Quand Super Mario est apparut, la syntaxe du gameplay était fermement établie ; et elle reste la grammaire standard aujourd’hui. Le joueur progresse à travers le jeu, vainquant des ennemis, restaurant son énergie avec des « power-ups » qu’il trouve sur sa route, accumulant des points bonus pour s’élever progressivement vers des niveaux de plus en plus difficiles, dont beaucoup contiennent un « boss » qui doit être vaincu pour pouvoir sauver le jeu et ne pas devoir refaire le niveau. Même si Super Mario, qui a débuté au Etats-Unis en 1985, avait un objectif (sauver la princesse Peach du reptile géant nommé Bowser), il encourageait aussi l’exploration pour son propre intérêt ; de ce point de vue, c’était moins un jeu de compétition qu’un logiciel-jeu – un concept qui influença la notion de l’espace du possible de Will Wright. « L’étendue et l’envergure du jeu m’ont renversé » Wright m’a dit. « C’était conçu à partir d’éléments simples, et cela marchait avec des règles simples, mais on lui rajoutait un design très complexe. ».

A la fin des années 90, la PlayStation de Sony a remplacé la NES comme la console de salon dominante, et la Xbox de Microsoft apparue en 2001, est maintenant la deuxième console la plus vendue. Mais ni Sony ni Microsoft n’ont eu l’influence de Nintendo sur le design de base des jeux vidéo.

En 1991, une nouvelle phase dans le business des jeux commença quand un jeune programmeur nommé John Carmack, qui était, avec John Romero, un partenaire dans la compagnie basée à Dallas appelée idSoftware, trouva comment programmer des effets 3D sur PC, autorisant les designers à donner plus de profondeur à leur espaces intérieurs et à créer des mouvements plus réalistes. Selon « Masters of Doom » le livre de David Kushner de 2003, quand Romero a vu le programme 3D de Carmack, il s’est exclamé, « C’est ça, on est parti !!! » Romero créa un jeu ultra violent, qu’il appela de son amour pour les bd d’horreur des années 50 publiées par Evergreen, combinés avec une sensibilité au heavy-metal. Le résultat fut Doom – définissant ainsi le first-person shooter (FPS) – dans lequel vous incarnez un soldat de l’espace, et l’objectif est de tuer des zombies qui viennent vers vous à mesure que vous vous enfoncez en enfer. Tout à propos du jeu était conçu pour exciter les fantasmes de pouvoir d’un adolescent provoquant en même temps une grande détresse chez ses parents.

En 1999, la plus vieille peur sur les effets antisociaux des FPS semblait s’être réalisée quand Dylan Klebold et Eric Harris, des adolescents, ont massacré douze de leurs camarades de classe et un professeur au lycée de Columbine, dans le Colorado. Ils se sont révélés être des joueurs obsessionnels de Doom. Des congrès sur la violence se sont ensuite succédés. Plus récemment, la version San Andreas de la série des Grand Theft Auto, dans lequel l’objectif est de voler pour arriver au sommet (vous pouvez obtenir de l’argent en agressant les prostituées), a provoqué Hillary Clinton à co-sponsoriser le « Family Entertainment Protection Act », qui veut bannir la vente de jeux violents aux mineurs. Clinton accusa aussi les créateurs de violence et de jeux explicitement sexuels de « voler l’innocence de nos enfants et faire du travail de parent un travail encore plus difficile ».

Un jour dans son bureau, Wright m’a montré un e-mail qu’il avait reçu de Lara M. Brown, un professeur de sciences politiques à l’université de Californie, Channel Islands, en réponse à un essai qu’il avait écrit pour Wired à propos de la valeur éducative des jeux vidéo. Brown, qui utilise la technologie dans ses méthodes d’enseignement, a écrit, « La plupart d’entre nous s’accorde pour dire que la nouvelle génération – élevée avec les jeux vidéos – a appris à être réactive, à la place de active, et pire, ils ont perdu leur capacité d’imagination et de création parce que les jeux leur procurent toutes les images, les sons, et les issues possibles pour eux. Nos élèves tendent à ne pas savoir comment poser une question, formuler des hypothèses ou conduire un débat parce qu’ils aiment attendre et voir ce qui se présentera à eux. Ils ont aussi des difficultés à imaginer des mondes (des lieux et/ou des époques) sauf si vous (en tant que professeur) ne leur fournissiez une image, un son pour accompagner les mots. …En bref, ils semblent avoir perdu leur habilité à visualiser avec leur esprit. »

Toutefois, Wright croit que les jeux vidéo enseignent comment apprendre ; ce qui doit changer c’est la manière dont on enseigne aux enfants. « Le problème avec notre système éducatif c’est que l’on prend cette approche étroite, réductionniste, Aristotienne de l’apprentissage. ». « Ce n’est pas fait pour que l’on puisse trouver son propre chemin intuitif dans ce système complexe, ce que les jeux apprennent par contre. Ce n’est pas vraiment conçu pour l’échec, ce qui est aussi quelque chose que les jeux vidéo apprennent. Je veux dire, je pense que l’échec est un meilleur moyen d’apprendre que le succès. Essai et erreur, des trucs en reverse engineering dans votre esprit – tous les moyens que l’enfant se sert pour interagir avec le jeu – voilà le genre d’école pensante que l’on devrait apprendre. Et je rajouterais que, à mesure que le monde devient de plus en plus complexe, et que les issues sont de moins en moins l’échec ou le succès, les jeux sont le meilleur moyen de se préparer. Le système éducatif le réalisera tôt ou tard. Ca commence. Les professeurs entrent dans le système qui apprend en jouant à des jeux. Ils voudront s’engager avec des jeunes utilisant les jeux.




Peu de temps après s’être installé avec Jones, Wright a commencé à créer un simulateur d’hélicoptère sur son ordinateur personnel (un commodore 64). Finalement, le simulateur a évolué en un shoot-’em-up dans lequel le joueur conduit un hélicoptère survolant plusieurs villes et îles, essayant de bombarder les bâtiments et de faire exploser les ponts. Wright montra son jeu à Gary et Doug Carlston, les fondateurs de Broderbund, une des premières compagnies de jeux vidéo. En 1984, Broderbund l’a sortie en tant que jeu PC nommé Raid sur Bungling Bay, et il est sorti en cartouche Nintendo l’année suivante. C’était seulement un succès modéré pour l’ordinateur, mais il s’en est vendu un million de cartouches, principalement au Japon, et grâce aux généreuses royalties de Nintendo pour Broderbund, Wright a dit « j’ai fait assez d’argent pour vivre plusieurs années ».

En créant Raid sur Bungling Bay, Wright s’est rendu compte qu’il était « plus intéressé par créer les bâtiments sur les îles que par les faire exploser ». Il commença à réfléchir à un jeu dans lequel le but serait de créer des bâtiments, ou, peut-être, de construire une ville. Un voisin a suggérer que Wright jette un coup d’œil à un livre de 1969 appelé « Les dynamiques urbaines » par Jay Wright Forrester, un professeur du MIT, qui soutenait que le planning urbain pourrait être mené à bien plus rationnellement par une simulation sur ordinateur que par les humains, parce que l’ordinateur ne serait pas aveuglé par ses intuitions biaisées. Dans un livre paru plus tard, « Les dynamiques du monde » Forrester élargi sa proposition pour une simulation qui pourrait gérer une planète entière.

Les simulations sur ordinateur étaient arrivées aux alentours des années 50, quand les planificateurs militaires, les climatologues et les visionnaires économiques ont commencé à programmer des modèles de dynamiques et de scénarios particuliers, en les utilisant pour en prévoir les issues. Une des premières et bien connu simulation fut Le Jeu de la Vie, créé par un mathématicien nommé John Horton Conway, en 1970. Le jeu simulait l’évolution et la mort d’une créature vivante, basé sur le principe de « cellule automate », dans lequel le programmeur assignait des règles simples pour des cellules distinctes. Il peut être joué sur une grille en deux dimensions, sur laquelle les carrés noirs représentent les cellules vivantes et les blancs, les mortes. Chaque cellule réagit par rapport à l’état des cellules autour d’elle. Les règles sont : (1) Une cellule vivante avec moins de deux voisines vivantes meurt de solitude ; (2) Une cellule vivante avec plus de trois voisines meurt de surpopulation ; (3) Une cellule vivante avec deux ou trois voisines vit ; (4) Une cellule morte avec trois voisines revient à la vie. L’intention de Conway était de montrer comment une simple structure de cellule était organisée algorithmiquement pour simuler de manière complexe la vie dans un système où l’imprévisible est de mise.

Wright trouva un moyen de combiner les idées de Forrester et de Conway pour imiter la dynamique d’une ville. Le joueur devrait ajuster une centaine de variables pour que la ville puisse grandir. Vous établissez des réseaux de transports, des grilles de pouvoir, des hôpitaux et des écoles. Chaque décision affecte d’autres variables : un taux de criminalité en hausse conduit à une baisse de la population, ce qui érode la taxe de base, ce qui requiert de couper un service essentiel – moins de fonds pour les hôpitaux par exemple.

Wright a construit un prototype du jeu et travailla dessus pour Broderbund, mais la compagnie n’a pas su voir le potentiel commercial dans un jeu où l’on ne pouvait pas gagner. Finalement, Broderbund a rendu les droits à Wright, qui est alors parti à la recherche d’un allié.



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Un soir, lors d’une soirée pizza à Alameda, Wright rencontra Jeff Braun, un jeune businessman qui voulait se lancer dans les jeux vidéo. Braun m’expliqua « Will m’a montré le jeu et m’a dit ‘Personne n’en veut parce qu’on ne peut pas gagner’. Mais j’ai trouvé ça bien. J’ai pressenti un public de mégalomanes voulant contrôler le monde. » Ensemble ils fondèrent Maxis et sortirent SimCity en 1989. (Broderbund les a finalement rejoint comme distributeur, après que Wright ait rajouté un moyen permettant aux joueurs de détruire leur ville avec différents désastres – un volcan, un tremblement de terre, une attaque extraterrestre, une pluie de météorite.)

SimCity a été long à se lancer mais dix-sept ans plus tard le jeu a rapporté à la compagnie 230 millions de dollars. Un nombre important de joueurs qui ont commencé à être intéressés par l’urbanisme grâce au jeu sont devenus par la suite architectes et designers, faisant de SimCity le travail le plus influent en terme de théorie urbaniste jamais créé.




En 1986 Wright et Jones eurent une fille, Cassidy, et Jones fit promettre à Wright de partager l’éducation parentale de manière équitable afin qu’elle puisse continuer la peinture. « Il a vraiment tenu sa promesse »m’a-t-elle dit. « Il a passé beaucoup de temps avec Cassidy ». Pendant qu’il était à la maison avec sa fille, une idée de nouveau jeu commença à germer dans son esprit, une sorte de maison de poupée interactive que les adultes voudraient autant que des enfants. « J’ai parcouru ma maison en regardant tous mes objets et en me demandant ‘Quel est le plus petit nombre de motivations ou de besoins qui puisse justifier tout ce bordel dans ma maison ?’ Il devait y avoir une raison à tout ce qui se trouvait là. Quelle raison ? »

Un matin en 1991, alors que Wright se réveillait dans sa maison de Oakland Hills, il pensa sentir de la fumée et appela 911 (ndlr : les urgences en Amérique). Pendant la demie heure qui suivie, la fumée empira. « J’ai pensé, oh-oh, ça ne présage rien de bon » Avec sa femme ils décidèrent qu’il était temps d’évacuer (Cassidy était chez une copine cette nuit là). Ils attrapèrent quelques photos de famille, sautèrent dans la voiture de Jones et s’en allèrent. Quand ils revinrent trois jours plus tard, l’incendie de Oakland Hills avait tout détruit. Il n’y avait plus rien à part quelques bouts de métal fondu, le souvenir de leur autre voiture. Durant les mois qui suivirent, alors que Wright allait de magasins en magasins pour remplacer ce qu’ils avaient perdu, il commença à penser à toutes les choses que les gens avaient besoin. « J’ai horreur de faire des course et là j’étais forcer d’acheter toutes ces choses, du dentifrice jusqu’aux meubles en passant par les ustensiles et les chaussettes. »

Trois travaux aidèrent Wright à comprendre comment il pourrait transformer ces expériences de la vie en un jeu. Le premier était le livre « A Pattern Language » de Christopher Alexander et ses collègues du Centre pour les Structures Environnementales, à Berkeley. Le livre répertorie 253 manières de construire, décrits comme des modèles, et cela montre comment ces modèles peuvent créer des espaces vivables satisfaisants. L’idée est que la valeur de l’architecture peut être mesurée par la joie des personnes qui vivent dedans. Le second était l’article de 1943 du psychologue Abraham Maslow « A Theory of Human Motivation » (Une théorie de la motivation humaine) dans lequel Maslow décrit une hiérarchie en forme de pyramides des besoins humains, avec les besoins « physiologiques » en bas et au dessus la « sécurité », l’« amour », l’« estime » et en haut l’« évolution personnelle ». La troisième inspiration fut les « Maps of the Mind » (Cartes de l’esprit) de Charles Hampden-Turner, qui comparent plus de 50 théories à propos de comment fonctionne l’esprit humain. En mettant ensemble ces trois travaux, Wright formula un modèle pour pouvoir « évaluer » le contentement des gens de sa maison de poupée par leur statut, popularité, succès et par la qualité de l’environnement que le joueur crée pour eux – plus la maison est confortable, plus les gens sont heureux. Wright m’a dit : « Je ne crois pas que les théories sur la psychologie humaine sont correctes. Les Sims s’est juste trouvé être un micmac de choses qui marchent dans le jeu. »

D’un point de vue technique, l’exploit de Wright dans les Sims, fut de créer une nouvelle sorte de système d’exploitation orienté objet qui modélise la complexité de la dynamique sociale. Comme Chris Hecker, un des développeurs de Spore, me l’a expliqué, « dans les jeux de Will, les objets eux-mêmes sont encodés pour interagir avec l’environnement autour d’eux. Donc si vous introduisez une machine à expresso achetée dans le centre commercial des Sims on-line, les Sims vont être capables de faire des expressos sans avoir à reprogrammer le jeu. Tout ce que vous avez à faire est de lâcher l’objet dans l’environnement et de nouvelles choses se passeront. Les objets créent les verbes comme on dit ».

Le Sim original avait 8 motivations ou besoins – la faim, l’hygiène, l’envie d’uriner, le confort, l’énergie, le social, l’amusement, et l’habitat – tous étant affectés par les objets dans le monde autour d’eux. La vie pour un Sim est la recherche du bonheur, mais le bonheur dépend des interactions sociales et de la consommation, et la consommation nécessite de l’argent. Par exemple, le moins cher des lits dans Les Sims 2, qui coûte 300 « simflouze » rapporte à votre Sim un point de confort et deux points d’énergie ; Un lit à 3000 simflouze rapporte 7 points de confort et six d’énergie. Wright a dit qu’il avait prévu le jeu comme une parodie de la consommation parce que « si vous vous asseyez là et construisez une grande maison pleine de choses, sans tricher, vous réalisez que tous ces objets finissent par aspirer tout votre temps alors qu’ils avaient promis de vous en faire gagner ».

Presque aucun joueur des Sims, Wright inclut, ne suit en fait les règles du jeu, qui force le joueur à passer des heures à faire de petits boulots pour pouvoir s’offrir des objets plus intéressants. La plupart des joueurs utilisent les « cheats » qui sont largement disponibles sur Internet et qui ont été introduits dans le jeu par les programmeurs. Les cheats sont des petits bouts de code que l’on peut taper dans le jeu et qui permettent de passer outre les règles. En tapant « motherlode » par exemple dans les Sims 2, cela donne 50000 simflouze à vos Sims. Mais utiliser les codes ne sonne pas vraiment comme tricher, parce que jouer aux Sims ne semble pas vraiment comme un jeu. Cela ressemble plus à du jardinage ou à la réparation de sa maison. Une des petites prouesses du jeu est de faire du travail un amusement. Comme ma nièce de 14 ans s’exclama récemment quand je lui ai demandé ce qu’elle aimait dans les Sims, « vous avez un Sim que vous devez amener à l’école, un autre qui a besoin d’aller à son travail, et leur enfant qui a été debout toute la nuit et qui est de mauvais poil, et puis la maison est sale – j’veux dire, y’a un million de choses à faire ! »

Quand Wright a amené son idée au conseil d’administration de Maxis, selon Jeff Braun, « les membres ont regardé les Sims et ont dit ‘Qu’est ce que c’est que ça ? Il veut faire une maison de poupée interactive ? Il a perdu la tête’ » Les maisons de poupées étaient pour les filles, et les filles ne jouaient pas aux jeux vidéos. Maxis donna peu de support et de financement pour le jeu. Electronic Arts qui acheta Maxis en 1997, se montra plus enthousiaste. (Wright reçu 17 millions de dollars en actions EA pour son partage de la compagnie). Les jeux de Wright sont tellement différents des autres jeux de EA qu’il était difficile de les imaginer unis en la même entreprise. Mais le succès de SimCity avait déjà établi Sim comme une marque forte et EA qui depuis, 15 ans après sa création, est devenu une compagnie au management du style de Procter & Gamble, pressentit la possibilité de construire une franchise Sim. Sorti en 2000, les Sims fut un succès immédiat. C’est devenu le jeu PC le plus vendu de l’histoire. EA l’a depuis sorti pour plusieurs autres plateformes et sorti de manière régulière plusieurs add-ons ajoutant du nouveau contenu. (Wright travailla sur les Sims 2, qui était un renouvellement majeur du graphisme, mais n’a rien eu à voir avec les add-ons). La franchise Sim a rapporté à EA plus d’un milliard de dollars jusqu’à maintenant. Le seul faux pas d’EA fut les Sims Online. La version multi-joueurs sortie en 2002, n’attira pas les masses escomptées comme l’ont fait d’autres jeux multi-joueurs tel que World of Warcraft et Runescape.

Les Sims apporta une immense nouvelle population aux jeux vidéo : les filles. Cela n’apparut pas comme une grande surprise à Wright, puisque les femmes occupaient 40 % de son équipe de développement pour les Sims et que sa fille Cassidy, qui avait alors 14 ans, l’avait aider à bricoler les prototypes. Wright m’a dit : « quand j’étais enfant, je n’ai jamais joué avec des poupées, ce qui est plus une action sociale que jouer avec des trains – c’est à propos des gens dans la maison. Cassidy m’a aidé à voir ça. Elle et ses amies sont entrées dans le coté purement créatif du jeu plutôt que le coté orienté objectif, ce qui m’a beaucoup influencé » Cassidy fut traumatisée de découvrir que les Sims pouvaient brûler leur maison et mourir dans le feu, s’ils n’étaient pas prudents autour de la cuisinière. Wright laissa cette caractéristique dans le jeu.

Un effet involontaire du succès des Sims est que Wright a transformé l’expérience tactile du jeu avec les poupées, qui jouait un rôle dans le développement infantile depuis des milliers d’années, en une expérience virtuelle. L’énorme succès des Sims signifie que de nos jours les enfants peuvent grandir sans avoir les expériences de la vie sur modèle réduit, expériences que Wright aimait enfant et qui l’inspira pour faire ses jeux au départ.




Un soir, je suis allé avec Wright à la maison où il avait déménagé avec Jones après l’incendie de Oakland Hills. Il conduisait une BMW noire, deux portes, avec un détecteur de radars élaboré. La voiture était une saleté, dedans et dehors. Wright ne la lave jamais, parce qu’il veut qu’elle ressemble à un des vaisseaux intergalactiques amochés de Star Wars. Après s’être garé dans le garage, il m’a laissé entrer dans la maison à travers un petit vestibule qui était plein de bouts d’acier aux formes étranges. Wright expliqua que ça restait du temps où il concourait dans des compétitions de robots gladiateurs, appelées BattleBots, dans lesquelles les ingénieurs essaye de construite le plus destructeur des véhicules robots télécommandés. Ces machines féroces combattent dans de larges boites en Plexiglas, se percutant à grande vitesse, et essayant de déstabiliser leur adversaire en les renversant. Les tournois sont comme des combats de coqs pour geek. Un des robots de Wright, qu’il avait conçu avec l’aide de Cassidy, s’appelait Kitty Puff Puff. Il combattait ses adversaires (qui avaient des noms comme Eviscerator et Death Machine) en collant l’extrémité d’une bande sur leur armature et en leur tournant autour jusqu’à ce que le robot adverse soit tellement enveloppé tel un cocon dans la bande qu’il ne puisse plus bouger. Au final les organisateurs interdire cette pratique.

La maison, divisée en plusieurs étages, était au sommet d’une colline à Orinda, et elle avait une vue magnifique du Mont Diablo. Les peintures de Jones – colorées, abstractions biomorphique – étaient accrochées au mur, et dans le jardin trônaient ses sculptures : des objets au look architectural fait de métal fondu. Mais les affaires de Wright prenaient la plupart de la place. Juste derrière la porte d’entrée était posée la manette de commande d’un vaisseau Soyuz 23, des années 70, que Wright à acheter d’un ancien officier. En haut, il y avait sa collection d’insectes bizarres. Cassidy était à l’université, mais ses traces – des collages fantasques représentants des dessins de lapins et de prises électriques – étaient aussi étalés, et j’ai vu une bd qu’elle a faite « Les aventures d’une fille Pas Asiatique ». Sur le porche, derrière le salon on pouvait voir de larges blocs d’albâtre que Wright était en train de sculpter avec des outils, en quelque chose de lisse à la forme style Brancusi, une passion que Jones avait suggérée à son mari comme un moyen d’exprimer son côté artistique. La couche de poussière et de cendre environnante sur le porche laissait penser qu’il avait récemment passé un nombre considérable d’heures avec la meule.

La maison était aussi remplie de livres. Certains sont ce que Wright appelle « landmarks » -- des fondations pour le design d’un de ses jeux. « La plupart des jeux que j’ai fait étaient inspiré de livres » m’a-t-il dit. SimEarth, une simulation de l’écologie de la Terre, était basé sur l’hypothèse de Gaia de James Lovelock et SimAnt, une simulation d’une colonie de fourmis était basé sur « Les fourmis » de E.O Wilson. Les repères clefs pour Spore, toutefois, ne furent pas les livres. C’était les équations de Drake et « le pouvoir des dix ». Le premier, qu’il me montra sur son écran d’ordinateur dans son bureau, est la formule inventée en 1961 par Frank Drake, un radio astronome, pour estimer le nombre de monde possibles dans notre galaxie qui pourrait être habités par de la vie qui pourrait communiquer avec nous. (Environ 10 mille, en se basant sur le calcul de Drake). Le dernier est un court métrage de Charles et Ray Eames fait en 1977 qui commence mettant en scène un homme étendu sur l’herbe dans un parc de Chicago, et puis on voit une série d’images du même plan, chacun pris d’une position dix fois plus loin que la précédente, jusqu’à ce que l’on atteigne la limite de l’univers à 1024 mètres (dix exposant 24). Puis le film retourne sur sa première image et part dans l’autre sens, zoomant dans la main de l’homme, jusqu’à ce que à 10-16 on atteigne la limite du monde intérieur – l’espace dans un proton.

« J’adore ‘les puissances de dix’ » a dit Wright et j’ai toujours été un grand fan de Eameses. En même temps, Je suis vraiment intéressé par l’équation de Drake, et quand j’ai commencé à travailler sur Spore, je l’utilisais pour représenter certain gameplay. A un certain point, j’ai réalisé que l’équation de Drake correspondait parfaitement avec l’échelle de « puissance de dix ». Donc j’ai intégré les deux à Spore. »
Wright paraissait plus intéressé par créer les jeux qu’il ne l’était par intégrer ses idées en philosophie cohérente. Après avoir joué aux Sims assez longtemps, par exemple, vous commencez à reconnaître tous les chemins par lesquels la simulation ne colle pas à la vraie vie. (Les Sims 2, qui est sorti en 2004, a ajouté plus de finesse au design de base, en plus des motivations et des besoins, il y a quatre aspirations différentes). Les Sims est seulement aussi réaliste que la théorie sociale sur laquelle il est basé, et ces nouvelles théories ont été combinées, pas par rapport à des principes scientifiques, mais pour les besoins du jeu. Les Sims ne modèle pas vraiment la dynamique humaine ; le jeu vous donne simplement un modèle pour explorer votre propre idée sur comment marche une famille (tout comme le fait de jouer à la poupée). Wright n’est pas un visionnaire, dans le sens qu’il n’est pas l’auteur d’une nouvelle façon de penser du monde ; il adapte ses idées en fonction de paramètres techniques de la simulation et dans la logique des jeux. Si le jeu contient des batailles interstellaires, ou des changements de climat, la simulation travaille sur sa propre logique. Wright est peut-être les meilleurs auteurs de l’industrie des jeux, mais par extrapolation, il a abdiqué la paternité de ses créations.

Jones est revenu avec un plat Mexicain, et nous avons mangé dans l’emballage, dans le salon. Jones a une voix douce, mais elle a une autorité silencieuse sur la maison. Elle semblait un peu effacée. Je lui ai demandé si elle jouait au jeu de son mari. « Non, je ne suis pas vraiment intéressée dans les jeux vidéo » a-t-elle dit sympathiquement. Plus tard, elle a ajouté « Notre fille Cass a l’habitude de dire ‘Nous vivons à travers la création de jeux vidéo, alors nous n’avons pas besoin d’y joueur’ Je pense que cela frustre Will que je ne joue pas à ses jeux. Clairement, ses jeux importent, à un niveau profond, à beaucoup de gens – prenez par exemple ces journaux intimes que les gens tiennent à propos de leurs Sims. Je ne sais pas s’ils évitent leur vie ou s’ils en apprennent sur eux. Moi, je ne veux pas jouer à un jeu pour apprendre des choses sur moi-même » Quelques mois plus tard, quand j’ai entendu que Wright et Jones pensaient à se séparer, et que Wright était parti, je me suis souvenu des mots de Jones.

J’ai demandé à Wright s’il travaillait sur un nouveau jeu. Il a dit que, pour la première fois dans sa carrière, non, il ne travaillait pas sur un nouveau jeu. Il recherchait le programme spatial des Soviets, espérant faire un film documentaire dessus. Il a dit qu’il envisageait sérieusement de retourner aux courses de rallye en Novembre pour concourir dans la Baja 1000 – une course à travers le désert. (Il a plus tard changé d’avis) Il avait un agent à Hollywood et un marché de développement de TV avec ABC pour une émission de télé-réalité explorant les relations de la technologie dans la maison. Mais ce soir là, au moins, il n’a semblé occupé par aucun de ces plans. Quand la perspective de Spore émergea, il sembla un peu perdu.




En Mai, j’ai rejoint quelques 20 mille membres de l’industrie du jeu vidéo – développeurs, marqueteurs, distributeurs, acheteurs, la presse – à Los Angeles pour la grande représentation du commerce, l’expo de Electronic Entertainment, ou E3. Electronic Arts, qui avait espéré en vain que Wright aurait fini le jeu pour la convention, offrait à la place au public l’opportunité de voir Wright faire une démonstration du jeu, dans un stand spécial dédié à Spore juste à côté de l’énorme pavillon de EA.

Mercredi à 10h, quand E3 commença, Wright était installé dans son stand, qui pouvait accueillir trente personnes. La file pour aller dans le stand de Spore s’agrandit rapidement à deux heures d’attente, serpentant dans l’expo. La mission de Wright était de jouer à tout le jeu -- ce qu’il estimait devait représenter 79 ans non-stop si on veut tout explorer (Wright va créer des cheat codes) -- en 17 à 20 minutes, encore et encore, pendant deux jours.

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A l’E3, des écrans montraient des flingues, des voitures, des joueurs de foot et des filles virtuelles vêtues de lycra appliquant l’adage qu’un blog de jeu avait sorti « meilleures sont les apparitions furtives des seins, meilleurs sont les seins physiquement et plus profonde est la personnalisation des seins ». C’était comme si nous étions tous à l’intérieur d’une gigantesque machine à jeux vidéo – l’endroit que Nolan Bushnell avait imaginé 35 ans auparavant.

Au pavillon d’EA, j’ai rejoint un groupe de personnes se regardant jouer les uns les autres à Battlefield 2142, la dernière suite du célèbre shooter d’EA. J’ai fais une partie tout en continuant de transpirer et d’être accueilli par la vue alarmante de mon visage réfléchissant sur l’écran – crispé, rouge, à l’air démoniaque. Titubant jusqu’à la sortie du pavillon d’EA et jusqu’au cyber center, j’ai essayé quelques jeux non violents, dont Guitar Hero, dans lequel le designer a ingénieusement transformé le contrôleur en une guitare à laquelle on joue en appuyant sur des boutons. Ca rend comme le son d’un karaoké. J’ai aussi essayé SingStar Rocks, un jeu Playstation qui mesure si ce que tu chantes est juste, tes paroles et ton timing et te note au fur et à mesure que tu chantes. (Malheureusement j’avais choisi « Comme as You Are » de Nirvana qui n’est pas une chanson facile, et ensuite j’ai essayé de réduire mes problèmes en essayant de chanter sur le même ton que Kurt Cobain. « Horrible », voilà ce qu’étais le jugement du jeu de ma performance, et ça m’a énervé toute la journée !).

Finalement j’ai testé une démo de Left Behind, un jeu basé sur le thème du christianisme inspiré des célèbres livres-séries de Tim LaHaye et Jerry B. Jenkins. On incarne un chrétien dans les rues du Manhattan d’après l’apocalypse et le but est de convertir autant de non croyants que possibles avant la venue du Jugement Dernier. On gagne des bonus à chaque fois que l’on trouve des bouts de scripts, et prier augmente notre niveau spirituel – ce qui est représenté par une jauge graphique en haut de l’écran. Toutefois, on doit tuer les non croyants hostiles et on peut acquérir quelques bonnes armes pour ça. La violence fait baisser notre niveau spirituel, mais la prière peut le faire remonter aussitôt.

L’influence de Will Wright n’était pas immédiatement flagrante à l‘E3. Son concept de « bac à sable esthétique » est plus apparent dans les communautés en lignes comme Second Life, créée par Linden Lab et basée à San Francisco, qui utilise un système d’exploitation similaire à celui des Sims Online. Les joueurs de Second Life peuvent acheter de l’espace dans les communautés genre Sim City et l’utiliser pour des transactions commerciales – effectuées dans une devise virtuelle qui peut être échangée contre de la vrai monnaie dehors dans la vraie vie. Les musiciens prétendants peuvent jouer sur scène pendant que leur musique passe en streaming sur un canal audio. Second Life semble comme une conséquence logique aux jeux de simulation de Wright – et ce n’est techniquement pas un jeu du tout. Quand j’ai interrogé Wright à propos de Second Life, il a dit « je pense que ce que l’on va voir maintenant sur Second Life, ce sont des gens qui vont commencer à développer des jeux – quelqu’un va inviter d’autres personnes à taper dans un ballon de football, et ça va partir de ça ».

La situation de Wright dans le stand était un peu la même que sa situation au sein de l’industrie du jeu vidéo – il semblait à la fois roi et prisonnier. Je pouvais à peine distinguer Wright, assis derrière une multitude d’ordinateurs sur une plateforme derrière les chaises, des raies colorées se réfléchissant des écrans sur ces lunettes. Il y avait un large écran sur un mur où le jeu était projeté. Cela faisait environ 5 heures qu’il présentait Spore quand je suis arrivé, sans repas ni pause cigarette, même si les organisateurs d’EA lui avaient amené un Mocha Frappuccino, sa boisson favorite, de chez Starbucks.

Je me suis assis. Il y avait de petits trous dans le plafond remplis de lumière pour simuler des étoiles. Les murs du stand étaient décorés de modèles de créatures que d’autres joueurs avaient crées. Les lumières s’éteignirent et le jeu commença. « OK, donc on commence ! Et je suis en train d’essayer de survivre là – Oups celui là essaye de me manger là ! ». Wright a expliqué le jeu à la première personne, et il semblait vraiment s’amuser. Avec l’éditeur de créature, il a assemblé une créature mi-reptile mi-oiseau, striée de bandes jaune et violette, avec quatre pattes dégingandées et des serres aux bout des bras. Elle semblait à la fois mignonne et sauvage. « OK maintenant il faut que je survive et que je mange – Oups je vais m’éloigner de cette bébête. Oups pas par là – c’est un monde sévère en ce moment. » Sa créature mangea un œuf d’une autre créature. « OK maintenant que j’ai mangé, j’ai bien envie de m’accoupler, » et il trouva une partenaire que l’ordinateur avait générée pour lui. Les créatures y sont venues, discrètement, derrière une bouffée de fumée, au son d’un doux morceau de jazz. « Accouplement généré procéduralement » dit Wright dans un gloussement de fumeur.

Wright avança dans les niveaux, faisant aller l’évolution en hyper vitesse au fur et à mesure que sa créature acquérait des maisons, des outils, des armes, des véhicules et des villes. Pendant qu’il racontait les aventures de sa créature, Wright expliqua aussi comment, en avançant dans les différents niveaux, le joueur passe en fait au travers de toute l’histoire du jeu vidéo : des jeux d’arcades (comme Pac-Man) au First Person Shooter (FPS) en passant par Super Mario de Miyamoto. Au stade tribal, vous jouez en quelque sorte Dieu dans le même style que Peter Molyneux et au stade civilisation cela ressemble au jeu Civilization de Sid Meier. Enfin, Wright atteignit le statut de Dieu intergalactique, avec le pouvoir de visiter d’autres mondes. « Maintenant nous allons aller à cet endroit où l’on peut voir qu’il y a une vie intelligente, et c’est en fait une lune, une lune de cette planète géante gazeuse là. Ok c’est une civilisation alien et il y a plein de différentes choses que je peux faire diplomatiquement – je peux par exemple lancer des feux d’artifice. OK ils ont l’air d’aimer ça. En fait là ils sont en train de me vénérer en tant que Dieu. Donc je peux décider de prendre un des ces petits bonhommes. » Un rayon tractant sorti de son vaisseau et aspira une des ces créatures. Elles commencèrent alors à lui tirer dessus. « Oups. Je crois que ça les a énervés ! »

A un certain moment de la présentation, la folle ambition de Spore devint claire : Wright était en train de proposer de simuler la possibilité sans limite de la vie elle-même. La simulation oscille entre le Darwinisme et le design intelligent, dans un nouveau territoire conceptuel. Wright a élaboré l’algorithme de la vie comme décrit par le philosophe Daniel C. Dennett dans « l’idée dangereuse de Darwin ». Denett a écrit : « ici est l’idée dangereuse de Darwin : le niveau algorithmique est le niveau qui correspond le mieux à la vitesse de l’antilope, à l’aile de l’aigle, à la forme de l’orchidée, à la diversité des espèces et toutes les autres occasions de réflexions du monde naturel… Est que ça peut vraiment être la conséquence de rien d’autre qu’une cascade de procédés algorithmiques basés sur la chance ? » Le vieux rêve des hacker du M.I.T qui sont venus avec Spacewar – pour recréer la vie sur un ordinateur – était en train de devenir vrai 40 ans plus tard, juste ici sur le stand de Spore, sous la forme d’une créature rayée, un peu dégingandée, ressemblant même un peu à Will Wright lui-même.

Après que Wright se soit occupé de l’autre planète, il dézooma pour révéler une vaste galaxie d’autres mondes, certains générés par l’ordinateur, d’autres créés par d’autres joueurs qui ont atteint le statut de Dieu intergalactique – « plus de monde que n’importe quel joueur pourra visiter en une vie entière » dit il. Alors que toutes les personnes de l’audience haletèrent à la vue de l’immensité de l’espace, le vaisseau de Wright zooma dans le bac à sable interstellaire, cherchant une planète inhabitée à coloniser, comme Will avait, petit, promis à son père qu’il le ferait.

C'est volontairement que je n'ai pas mis cet article dans spore si cela vous convenez pas vous avez qu'a le transferer moi je ne peux pas .

Dernière modification par cepalui ; 05/02/2007 à 10h28.
Réponse avec citation
  #2  
Vieux 05/02/2007, 10h46
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J'ai lu les deux premiers paragraphes, c'est très intéressant, je lirai le reste à tête reposée
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  #3  
Vieux 05/02/2007, 10h57
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Envoyé par Schnick
J'ai lu les deux premiers paragraphes, c'est très intéressant, je lirai le reste à tête reposée
Comme disait Danton sur l'échafaud...

Edit : je ne veux évidemment pas parler de notre Danton, mais du révolutionnaire...
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  #4  
Vieux 05/02/2007, 21h33
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En d'autres termes, je sais que dieu existe, c'est moi !

Mais l'idée n'est pas si neuve puisque SimEarth était à peu près le même concept. Dailleurs il avait en plus l'aspect climatique, la dérive des continents etc. J'aimais bien cette simulation écologique. Elle me semble plus pertinente que les délires "créationistes" de Spore. Car à vue de nez ça ressemble plus à du créationisme qu'à du Darwinisme, je ne vois pas beaucoup de sélection naturelle la dedans, surtout si des éléments totallement étranger à l'écosystème sont importés d'autres ordinateurs.
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  #5  
Vieux 05/02/2007, 23h50
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putain se mec est fou ... mais que ses jeu sont bien foutu ... et quel imagination ...
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citation de boris vian : Le jour où personne ne reviendra de la guerre, ce sera parce que la guerre aura été bien organisée.
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  #6  
Vieux 06/02/2007, 00h42
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Je pense comme Yboom... Même si je ne suis pas de ceux qui sont fans de ses créations.
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  #7  
Vieux 06/02/2007, 17h28
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Je le trouve pas si fou que ça moi. A sa place je ferais exactement pareil en fait.
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  #8  
Vieux 06/02/2007, 17h58
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Je ne suis pas fan(loin de là) des créations de Will Wright .
Spore est une exeption pour moi , j'ai été très attiré par les jeux de Sid Meier jusqu'au jour ou je suis tombé par hasard sur une déclaration de Wright.
Puis j'ai suivi le GDC de 2005 et là j'ai compris pourquoi Spore était le plus grand défi des jeux vidéo depuis leurs naissances.
Après il ne faut pas exagérer non plus Spore est une franchise commerciale donc il faut qu'elle raporte
Ad on et suites payantes ne feront pas défauts mais pour ce qui est un grand jeu... OUI!.... certainement ......le temps de développer un jeu multijoueur.
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  #9  
Vieux 06/02/2007, 22h51
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Quand même si je devais cumuler le temps passsé sur Sim City, Sim Earth et même les Sims ça ferait un paquet d'heures. Mais c'est vrai que Sid Meier est plus original, même s'il a du mal à se renouveller désormais.
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  #10  
Vieux 06/02/2007, 23h35
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Oui je comprends et tu as parfaitement raison sur Sid Meier

Dernière modification par cepalui ; 06/02/2007 à 23h44.
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