Franconaute  

Précédent   Franconaute > Autres jeux > Jeux de gestion

Notices

Réponse
 
Outils de la discussion Modes d'affichage
  #71  
Vieux 10/06/2008, 14h26
Avatar de marlouf
marlouf marlouf est déconnecté
Fan club La Tenaille Forever
 
Date d'inscription: août 2005
Localisation: Pôris
Messages: 3 697
Par défaut

Chapitre 11 : Schnickeon, Chal et Perennis, de l'Affrontement des Favoris


Je reportais quelques instants mes yeux sur le Triomphe qui s’étendait plus bas, impérial. J’avais constaté, amer, que Schnickeon en faisait parti, suivant de quelques pas le char où trônait Commode. J’avais également remarqué un visage impavide qui était loin de m’être inconnu, et même si j’avais espéré me tromper, du fait de la distance qui me séparait de la procession, l’armure et le casque étaient bien celui de Julius Sentencius. Le centurion avait certainement fini sa sordide tâche, même si les rumeurs, encore plus insistantes maintenant que l’on était à Rome, affirmaient qu’un jeune inconnu, certainement un fils adoptif ou l’un des enfants illégitimes d’Avidius Cassius, avait réussi à échapper au massacre qui avait touché tous les membres de la famille du général.

A mes côtés, Lucius Coelius regardait lui aussi le spectacle, un léger sourire aux lèvres – je ne savais pas si je devais y voir du sarcasme ou de l’admiration. L’enquêteur était bon, et déjà de nombreux notables lui avaient confié des missions requérrant un minimum de discrétion dans une ville aussi bavarde que Rome. De plus – et c’était là ce qui avait emporté ma décision – l’homme avait déjà voyagé pendant de nombreuses années en Orient, j’espérais donc que la connaissance qu’il pouvait avoir des peuples de Judée Samarie lui permettrait rapidement de retrouver la trace de mon frère Chazam, disparu 1 an plus tôt.



Une poignée de soldats triomphants passant sous l'arc de Titus


Tandis que son fils Jmlus restait sur place, les yeux grands ouverts et les cheveux en bataille, j’entraînais Coelius sous les arcades afin de lui donner toutes les informations qui pouvaient lui être d’une aide quelconque. Si nous étions d’accord que Chazam avait disparu aux environs de Jérusalem, Coelius estimait que son enquête devait débuter à Césarée, le port ou mon frère avait débarqué. Alors que je poussais Coelius à aller directement au cœur du problème, celui-ci me fit sagement remarquer qu’après plusieurs mois, la piste avait largement eut le temps de refroidir et que quelques jours de plus n’y changeraient rien. Coelius espérait surtout trouver des éléments expliquant la disparition de Chazam quelques jours en amont, alors que ce dernier effectuait le voyage entre Césarée et Jérusalem.

L’homme m’avait été chaudement recommandé, mais je découvrais là un homme honnête, patient, et qui s’annonçait méticuleux. J’avais toutes les chances de mon côté pour pouvoir retrouver Chazam. Tandis qu’une bourse pleine passait de ma ceinture à la sienne, je faisais une prière silencieuse aux dieux afin qu’ils guident Coelius sur la bonne voie.

Une semaine s’écoula, et j’imaginais déjà Coelius voguer sur la Méditerranée, quand vint l’heure du second triomphe pour Commode, moins formaliste mais tout aussi important que celui qui avait fêté la victoire de Marc Aurèle sur ses adversaires. Le petit morveux n’avait pas encore fêté ses 16 ans que son père lui offrait le titre de Consul, marquant par là même sa décision que son fils lui succéderait – ce qui était tout sauf évident pour le régime que nous connaissons .
L’année 177 commençait ainsi sous de bien mauvais augures, même si le plébéien de base se félicitait sottement de la décision du vieil empereur.
Je devais admettre que les choses avaient été faites en grand, et l’association de Commode aux victoires de son père laissait chez tous l’image d’un adolescent courageux et amené à rajeunir et revitaliser l’Empire. Le cadeau impérial que reçurent tous les Romains avait également largement favorisé la liesse qui s’étendait à toute la ville : après 8 ans d’absence, et pour fêter son retour et la position occupée par Commode, Marc Aurèle avait fait distribuer 8 pièces d’or, soit 800 sesterces, à chaque citoyen.

Un matin, un esclave apporta chez moi un petit sac de cuir fermé par un cordon, provenant directement du Palatin. Je l’ouvrais, et y trouvais les 8 pièces qui étaient traditionnellement distribuées aux seuls plébéiens. Je prenais l’une des pièces entre mes doigts, sans comprendre pourquoi je recevais ce qui apparemment ne m’était pas destiné, avant de blêmir et de lâcher le tout sur le sol en marbre. L’un des pièces roula sur 2 ou 3 mètres, avant de s’échouer contre la bute qui surélevait la grande cheminée qui réchauffait toute la pièce. La pièce sembla hésiter quelques instants, avant de tomber avec un petit bruit mélodieux.
Je me rapprochais, regardant le côté face de la pièce, parfaitement visible. Je reconnaissais le visage de Faustine, qui semblait cerné de flammes : l’or renvoyait les reflets venant de l’âtre, dans une image qui m’épouvanta. Même disparue, Faustine était appelée à me hanter, me poursuivant dans mes rêves et même ici, chez moi. Je quittais la pièce, sachant qu’à mon retour l’un des esclaves aurait certainement fait disparaître ces pièces qui m’effrayaient tant. C’était la première fois que j’avais sous les yeux le résultat de l’un des souhaits de Marc Aurèle, décidé un an et demi plus tôt à Halala – ou plutôt Faustinopolis. Des pièces à l’effigie de Faustine avaient donc été frappées après sa mort, empêchant quiconque (et surtout moi) d’oublier son visage.



Oh qu'elle est ... euh... belle !


Mais comme elles étaient rares parmi l’incroyable masse monétaire sortant chaque année du Trésor Romain, je n’avais pas à chercher loin pour trouver l’instigateur de ce cadeau empoisonné : Schnickeon se rappelait à mon bon souvenir, affirmant par là que je lui étais toujours redevable. J’étais surpris qu’il s’intéresse encore à moi alors que l’affrontement avec Perennis et son fils Chal prenait une tournure des plus sérieuses. Commode devenu Consul, il n’y aurait la place que pour un seul favori, qui concentrerait entre ses mains un pouvoir potentiellement illimité. Chacun des coups qui étaient désormais portés à l’autre avait pour but non pas seulement de l’éloigner de Commode, mais de le discréditer, lui faire perdre la face et la vie.

C’est dans ce climat particulièrement étrange que débarqua à Ostie le gouverneur de Cappadoce, Venitius Varon. L’homme avait deux ans auparavant sauvé la mise à l’empereur en Orient, s’assurant de la fidélité de ses troupes et faisant tout pour que la révolte d’Avidius Cassius soit circonscrite à la seule Egypte. Sa venue sembla surprendre agréablement Marc Aurèle, tandis que le reste de la Cour était dans l’expectative, s’attendant à un nouveau coup tordu entre Schnickeon, Perennis et Chal. Les courants se faisaient et se défaisaient au rythme des victoires des uns ou des autres, dans un ballet se révélant mortel pour celui qui se trompait sur le sens d’où soufflait le vent.

J’eus la chance, comme beaucoup d’autres, d’assister à l’entrevue entre Marc Aurèle et Venitius Varon. Celui-ci était suivi d’un jeune homme qui m’était parfaitement inconnu, et que Venitius présenta en ses termes à Marc Aurèle :

"- Altesse, j’étais présent lors du repas où vous avez assuré ne pas rejeter la faute du général Avidius Cassius sur sa progéniture, sa famille ou l’un des quelconques membres de sa descendance. Cette promesse, vous l’avez également faite auprès des Sénateurs, et il n’est pas dit que je laisse par mon inaction votre parole être désavouée, à votre insu, par des comploteurs. Ce jeune architecte s’est jeté à mes pieds alors qu’il fuyait depuis plus d’un an une mort certaine, celle qui s’est abattue sur ses frères, ses sœurs, sa mère, à travers tout l’empire. Altesse, je vous présente le dernier fils du général Avidius Cassius, Caius Avidius, et j’espère que vous trouverez celui qui complote contre votre auguste personne, en vous défiant de la sorte."



Avant de construire ça, mange ta soupe ! (Avidius Cassius à son jeune fils Caius Avidius)


Quelques exclamations s’entendirent parmi les témoins, peu habitués à ce qu’un empereur se voit tenu un discours de la sorte. Je savais pourtant que Venitius Varon était certainement l’un des rares gouverneurs, peut être le seul, à pouvoir s’adresser de telle manière à Marc Aurèle : sa fidélité lui conférait une assurance et une liberté de parole que tous ne pouvaient avoir.
Tandis que Marc Aurèle digérait ces paroles, je m’attardais un peu sur les traits d’Avidius Caius. L’homme avait aussi de la trempe, après avoir fuit pendant des mois le glaive de Julius Sentencius, de se jeter ainsi dans la gueule même de l’ennemi. Mais c’était particulièrement judicieux, puisqu’il venait rappeler les paroles proférées par l’empereur et qui avaient été démenties par la suite - se plaçant ainsi sous sa justice, mais surtout celle de Rome, seule à même de le sauver. C’était très bien joué, et celui qui s’avéra un jeune architecte pu ainsi commencer sa carrière pour le bien de Rome, à construire cirques et amphithéâtres, une fois absout des fautes de son général de père.

Dans l’entourage de Commode, à quelques mètres l’un de l’autre, Perennis et Chal jubilaient tandis que Schnickeon présentait un visage livide.


Sauras tu retrouver qui s'ennuit et n'a plus d'amis ?
Réponse avec citation
  #72  
Vieux 16/06/2008, 01h22
Avatar de marlouf
marlouf marlouf est déconnecté
Fan club La Tenaille Forever
 
Date d'inscription: août 2005
Localisation: Pôris
Messages: 3 697
Par défaut

Chapitre 12 : Des qualités du jeune Caius Avidius, futur bâtisseur


La révélation faite par le gouverneur de Cappadoce, Venitius Varon, eut des conséquences directes sur l’entourage de Commode. Marc Aurèle, a qui il avait été fait le grief, en public, d’avoir au mieux été dans l’ignorance de l’assassinat commandité sur la famille du général Avidius Cassius, sinon d’avoir délibérément menti, ne pouvait laisser un tel fait entacher une réputation qui jusque là était sans faille. Je découvrais ainsi dans l’intimité un homme finalement assez soucieux de l’image qu’il laisserait dans la postérité. L’égo un tant soit peu exacerbé de tout homme ayant dans ses mains la destiné d’un Empire et de ses 70 millions de sujets ? Ou le philosophe qui ne voulait pas que les actes de toute une vie, appelés à être commentés par ses successeurs, ne soient jugés à l’aune de ce qui révélait, certainement, d’une faute ?

Même au service de cet homme, je n’eux jamais la certitude qu’il fut responsable ou non, directement, des nombreux décès ayant frappé la famille Cassius. Mais le déballage public qui avait suivit l’affaire obligea l’empereur à s’excuser auprès du dernier fils du général, Caius Avidius. L’affaire pu être arrangée par la conclusion d’un contrat visant la réfaction de bâtiments publics à Rome même, et dont Avidius se vit chargé par cooptation impériale. J’eus l’occasion par la suite de me trouver quelques fois en contact avec le jeune Avidius, et l’image qu’il me laissa était particulièrement mitigée. Le jeune architecte était talentueux, certes, mais ses qualités humaines bien plus discutables. Faisant peu de cas des ouvriers qui travaillaient sur les chantiers, il accélérait sans cesse les constructions, rognait sur les coûts et la sécurité, ce qui se traduisit par un nombre anormal d’accidents mortels lors des travaux. Sa réputation fut bientôt faite et Avidius vit rapidement le nombre de travailleurs libres travaillant sous ses ordres chuter, au point qu’il dut avoir recours à un nombre important d’esclaves pour colmater les accidents et les départs.

Chose étrange également chez un homme venant d’une famille illustre - bien que le nom du général ait été effacé des édifices suite à sa sédition – était cette passion que le jeune Avidius semblait avoir pour tout ce qui se rapprochait du monde de l’arène, des gladiateurs et du sable que l’on versait sur le sang encore frais sur la piste. C’était là une passion fort compréhensible pour la plèbe, qui trouvait là un exutoire à sa basse condition, mais bien plus rare chez les patriciens et les chevaliers romains. Les sénateurs continuaient bien à se déplacer dans l’enceinte du Cirque Flavien, mais c’était souvent par nécessité d’être vu, et il n’étaient pas rare d’en voir certains s’endormir sur les gradins tandis que la foule s’enthousiasmait devant une nouvelle hécatombe.



Avidius Caius regardant l'équivalant du Drucker local


J’avais de mon côté bien du mal à voir un quelconque intérêt à ces spectacles, ce que mon entourage mettait sur le compte de mon origine grecque. La vérité était bien plus crue : suivant Marc Aurèle durant ses 6 années de guerre sur les rives du Danube, j’avais eu sous les yeux une cohorte de blessés et de morts, peut être bien plus que tout autre chirurgien grec ou romain. Aussi voir des hommes s’entretuer pour le seul plaisir de pauvres hères qui emplissaient les cirques, cela dépassait mon entendement.

Avidius semblait donc particulièrement apprécier la vie qu’il menait à Rome, et jamais je n’entendis de sa bouche une quelconque plainte sur le sort qui avait touché sa famille. Je le soupçonnais rapidement d’avoir pris la fuite pour éviter le glaive de Sentencius, mais sans qu’il ait exprimé un quelconque regret quant au sort qui avait frappé ses parents ou sa fratrie.

Dans le même temps qu’il donnait d’une main, Marc Aurèle se vit dans l’obligation de sévir et le coupable fut tout trouvé : Schnickeon, le favori de Commode, celui qui prenait ses consignes du fils de l’empereur et faisait tout pour grader sa place auprès du futur héritier. Marc Aurèle montra là sa fine connaissance de la politique romaine, en n’agissant pas de manière frontale. Inculper Schnickeon aurait signifié discréditer Commode, or l’empereur semblait persister dans sa volonté de mettre sur le trône son fils, qu’il se révèle un incapable, un intrigant ou un assassin. L’homme vieillissant s’était mis des ornières, considérant que la légitimité de ses successeurs était la seule à même d’éviter de funestes écarts, comme avait pu l’être la rébellion du général Cassius.

Le lendemain de l’entrevue entre Venitius Varron et Marc Aurèle, une accusation insistante filtrait des palais du Palatin, mettant en cause le passé de Schnickeon et l’enrichissement démesuré fait sur le dos de l’Empereur et de ses sujets. Il était monnaie courante que des proches des empereurs s’enrichissent ainsi, et on gardait encore à l’esprit les fortunes démesurées des plus connus, comme Sénèque et ses 300 millions de sesterces, un siècle plus tôt. Schnickeon n’avait pu faire une telle razzia sur le trésor, mais les premières estimations parlaient d’une fortune acquise de plus de 40 millions, une somme scandaleuse sachant l’état de dénuement dans lequel était arrivé le proxènete grec 2 ans plus tôt.

Marc Aurèle pressa alors Commode de mettre un terme à la rumeur qui enflait et qu’il avait sciemment initié dans l’un des bureaux de travail de son palais. Son fils, qui perdait contenance de jour en jour, se sépara alors de Schnickeon et l’on vit se dernier, un matin, quitter la colline du Palatin avec or et bagages, amenant avec lui un nombre impressionnant de partisans qui s’étaient trop longtemps mouillé à ses côtés pour rester à la Cour une fois sa disgrâce venue. La procession se délita néanmoins rapidement, les courtisans s’égayant comme des moineaux pour fuir Rome et le destin fatal qui devait certainement frapper Schnickeon. Ce dernier se retrouva rapidement seul, flanqué seulement de quelques hommes de main, avec l’interdiction de quitter la ville le temps qu’une enquête se penche sur ses agissements.



La procession quitte le Palatin ? Hop, un regard derriére, on est pas sur de revenir ...


Des fenêtres de sa suite, Perennis avait du assister avec délice au départ de son rival. Schnickeon écarté, et avec son fils Chal dans les draps de Commode, Perennis s’était offert la place de favori et les espérances qui allaient avec.
Réponse avec citation
  #73  
Vieux 29/06/2008, 20h59
Avatar de marlouf
marlouf marlouf est déconnecté
Fan club La Tenaille Forever
 
Date d'inscription: août 2005
Localisation: Pôris
Messages: 3 697
Par défaut

Chapitre 13 : Où Otto reçoit un invité peu orthodoxe



Au bout de quelques semaines, Rome bruissait encore de l’humiliation infligée à Schnickeon, tandis que la multitude, l’échine courbée, se pressait autour de Perennis, espérant ainsi s’attirer les grâces du nouvel homme fort de Commode. Le peuple ne s’était pas trompé, depuis sa nomination comme Consul, Commode s’exerçait à ce qui serait bientôt sa future tâche. Comme en retrait, son père Marc Aurèle consacrait tout son temps à l’écriture de ses mémoires, semblant se désintéresser de ce qui se passait dans l’Empire. Et pourtant les nouvelles semblaient alarmantes de tous les côtés : les Parthes semblaient vouloir de nouveau faire ingérence dans le gouvernement proromain mis en place en Arménie, tandis que les barbares refluaient de nouveau sur les rives du Danube, après seulement quelques années de paix.
Tout cela me laissait de marbre. J’avais même complètement évacué de mon esprit le souvenir de Schnickeon et le chantage qu’il exerçait sur moi. Je ne songeai qu’à Coelius, dont je n’avais plus de nouvelles depuis plusieurs mois, depuis qu’il était parti en Palestine pour retrouver la trace de mon frère Chazam. J’envoyais chaque semaine un serviteur au domicile de Coelius, espérant chaque fois obtenir des nouvelles… il n’y en avait jamais. La femme de Coelius, BenArtistim, était morte d’inquiétude, tant pour son mari que pour son fils, Jmlus, qui avait accompagné son père dans son périple. Pour le former, avait-il dit, mais je commençais à penser qu’il avait mal évalué l’éventuel danger du voyage.

La vie à Rome continuait son lent cheminement, semblant éviter les aléas de ce qui se passait tout autour. Nous fûmes les derniers à entendre parler d’une épidémie de peste qui s’étendait à travers l’Egypte et menaçait, en emportant tous les travailleurs de la région, l’approvisionnement en blé de la capitale. Nous fûmes également les derniers à apprendre la recrudescence de violence qui touchait la Palestine et qui n’était pas du, cette fois, aux Juifs, mais aux Chrétiens.

Une nuit, un serviteur vint me réveiller pour m’annoncer qu’un visiteur tambourinait à la porte de l’insula. Mes hommes avaient beau avoir menacé de l’assommer si c’était le seul moyen pour le faire taire, il insistait pour me voir et affirmait que je le connaissais. Il n’avait bien entendu pas divulgué son nom.

Je passais une dague à mon côté et demandais à mes hommes de fouiller le visiteur, et de se tenir prêt à intervenir s’il se révélait dangereux. Cette manière si brusque de me tirer de mon sommeil était certainement signée Schnickeon.
Tandis que j’attendais dans le patio, sous la surveillance d’un serviteur, le visiteur entrait et, une fois assurée de son inoffensivité, se présentait à moi. Il semblait bien trop menu et trop petit pour être Schnickeon, mais il pouvait toujours s’agir de l’un de ses hommes. Quand je pu distinguer son visage, à la lumière d’une torche, je me rendais compte qu’il s’agissait non d’un enfant, certes, mais d’un adolescent, qui ne m’était pas inconnu. Et cette chevelure … je me jetais aussitôt sur lui, maintenant que j’avais reconnu Jmlus, le fils de Lucius Coelius. Le garçon s’était épaissi et avait gagné en stature, on pouvait déjà deviner l’homme qu’il serait plus tard. Son visage était presque noir, de poussière peut être, ou d’une année passée sous le soleil brûlant de l’Orient. Son regard, surtout, s’était affirmé, et j’y distinguais des éclats de dureté .Il était loin, l’enfant aux yeux papillonnant qui ne pouvait détacher son regard du Triomphe organisé un an plus tôt …
Si sa voix, qui terminait tout juste de muer, décrocha chez moi un sourire instinctif, les nouvelles qu’il m’apportait m’étourdirent au point que je dus m’asseoir pour encaisser toute l’histoire.

Coelius avait donc embarqué à Ostie avec Jmlus, et tous deux avaient vogué d’abord jusqu’au Pirée, afin de suivre le chemin exact de Chazam à son départ de Grèce. La situation sur place s’était dégradée, et la quasi totalité des apprentis de Chazam avaient abandonné le navire avant la faillite qui était inéluctable. Ils avaient ensuite accosté à Césarée, en Judée Samarie, et remonté le chemin jusqu’à Jérusalem, là où sa trace s’était perdue. Si Coelius avait rapidement compris qu’aucun négociant n’avait jamais vu Chazam sur place, il lui avait fallu des trésors d’ingéniosités pour dépasser les problèmes de la langue, de la religion et des cultures différentes pour progresser dans son enquête. Les résultats étaient là, épouvantables : Chazam était bien en vie, certes, mais son penchant déjà prégnant pour la liberté face au poids du monde romain l’avait fait franchir le Rubicon : plongé dans un monde étrange, dans un vaste chaudron de cultures cosmopolites se réclamant toutes bien plus anciennes que les Romains et même les Grecs, Chazam avait fait office d’éponge, emmagasinant toute la rébellion du monde oriental. Se voulant tout d’abord Juif, quand il avait contemplé les restes du dernier temple détruit à Jérusalem, il avait ensuite été conquis par le christianisme, y voyant certainement un exutoire à son rejet de Rome.



Rejeter Rome, c'est rejeter tous les bienfaits de l'humanité ...


Tandis que la gorge nouée, je réclamais à l’un des serviteurs une coupe de vin, que je coupais d’eau avant de la boire d’une traite, Jmlus allait de révélation en révélation. Effectivement la colère grondait en Palestine, où les Chrétiens avaient décidé de partir en guerre contre la moralité romaine. Cela ne devait pas m’étonner, connaissant le caractère aventureux de mon frère, mais c’était bien Chazam qui avait pris les rênes du mouvement, n’hésitant pas à appeler à l’insurrection contre Rome. Quelques crucifixions avaient remis de l’ordre sur place, et Chazam s’était enfuit, décidé à apporter la graine de la rébellion non plus aux marches de l’empire, mais au centre même.

Je m’exclamais aussitôt et interrompais le récit de Jmlus.

-Tu veux dire que mon frère est ici ? A Rome ?
-Non, il a repris un autre bateau à destination de Massilia, et il souhaite remonter ensuite jusqu’à Lugdunum.

J’étais complètement décontenancé. Qu’allait bien pouvoir faire mon frère en Gaule, et quel était le rapport avec sa nouvelle foi ?
Jmlus sembla saisir mon incompréhension et me glissa :

-Tu sais, je les ai entendu parler, et je pense qu’ils veulent se faire soulever les Gaules…

L’idée était grotesque, et je n’osai imaginer dans quel délire obscurantiste avait bien pu tomber Chazam. La Gaule avait été conquise 250 ans plus tôt, et la romanisation y avait été excellente. Tous les aqueducs de Rome pouvaient s’effondrer avant que la Gaule ne fasse sédition comme une quelconque province d’Asie.


Les futures pentes de la Croix-Rousse, surplombant Lyon, capitale des Gaules

Mais en y réfléchissant, l’idée n’était pas si ridicule, vu la place prépondérante qu’avait prise la Gaule dans l’économie romaine. Des révoltes en Arménie ou en Egypte étaient une chose, les menaces que pouvaient exercer les Barbares sur le Danube et les Gaulois de l’autre côté des Alpes en était une autre, bien plus grave, et menaçant directement Rome.
Mais qu’est-ce qui avait bien pu passer par la tête de Chazam ? J’étais atterré par cet histoire de conversion, tant les rites chrétiens nous faisaient horreur. J’avais entendu dire que chaque nouveau membre devait planter un poignard dans une épaisse couche de farine, dans laquelle était caché un nouveau né. C’était par cet acte ignoble que les Chrétiens croissaient, dans la culpabilité de chaque nouveau membre devenu un meurtrier de la pire espèce. Soudainement, je tiquais sur ce que venais de dire Jmlus.

-Tu dis que tu les as entendu parlé… de qui s’agissait-il ?
-Hé bien… de Chazam, et de mon père, entre autres ! me répondit Jmlus, en toute innocence.

Je tendais mon verre pour le remplir de nouveau, mais mes doigts tremblaient tellement que le verre m’échappa et se brisa sur le sol en mosaïques.

-Ton père… mais pourquoi va-t-il en Gaule ?
-Mais parce qu’il accompagne Chazam, tout simplement !

Et Jmlus de faire un mouvement d’épaules hautain, comme si tout allait de soi. J’eus soudainement envie de baffer ce mioche débile, qui semblait me prendre pour un crétin et en disait bien moins qu’il n’en savait. Je serrais les poings, et tentait de garder mon calme.


Sale gosse ! Une grosse tignasse cachant une tête creuse !

-Mais dis moi… tout cela a encore un rapport avec l’enquête que j’ai confié à ton père ?

Jmlus leva les yeux au ciel, avant de m’achever :

-Non, il y va car il croit en Chazam, tout simplement !

Tandis que j’étranglais mentalement Jmlus et ses « tout simplement », je réalisais avec horreur que les conversions chrétiennes étaient en marche : j’en avais un exemple devant moi.
Réponse avec citation
  #74  
Vieux 29/06/2008, 21h30
Avatar de Maurice Morisson
Maurice Morisson Maurice Morisson est déconnecté
Honorable posteur
 
Date d'inscription: septembre 2007
Messages: 843
Par défaut

En fait, c'est plus un AAR, c'est une histoire , et très bonne de surcroit
Réponse avec citation
  #75  
Vieux 29/06/2008, 22h24
Avatar de jmlo
jmlo jmlo est déconnecté
Franconaute
 
Date d'inscription: août 2005
Localisation: quand on tire on raconte pas sa vie
Messages: 6 026
Par défaut

A mort Otto , vive Jesus !
Réponse avec citation
  #76  
Vieux 30/06/2008, 00h06
Avatar de marlouf
marlouf marlouf est déconnecté
Fan club La Tenaille Forever
 
Date d'inscription: août 2005
Localisation: Pôris
Messages: 3 697
Par défaut

Citation:
Envoyé par Maurice Morisson
En fait, c'est plus un AAR, c'est une histoire , et très bonne de surcroit
Merci !
J'avais commencé vaguement un AAR il y a plus d'1 an sur Civ'Rome (sans histoire au début) mais c'est vrai que sur ce type de jeu, autant en faire quelque chose sinon c'est chiant comme la pluie ... c'est pour ça qu'on a rarement vu des AAR sur Sim City (heureusement...)
En plus j'ai encore de la marge, j'ai un AAR à faire sur Caesar IV

Citation:
Envoyé par jmlo
A mort Otto , vive Jesus !
Fais gaffe, toi, avec ta chevelure abondante qui te protége du soleil, il n'est pas impossible que tu ailles finir ta vie à construire des murs croulants en Créte
Réponse avec citation
  #77  
Vieux 30/06/2008, 15h10
Avatar de Otto Granpieds
Otto Granpieds Otto Granpieds est déconnecté
Son excellence postissime
 
Date d'inscription: juin 2006
Messages: 1 631
Par défaut

Ah la famille...

C'est vrai que le christianisme s'est répandu rapidement dans l'Empire, dès le 1er siècle ap. J.C., mais d'abord surtout aux marges du judaïsme, dont les observateurs extérieurs pensaient qu'il était une "hérésie" et auprès de gens d'origine orientale.

C'est ainsi que Pothin, premier évêque de Gaule (ce qui indique bien qu'il n'y avait pas de communauté organisée en Gaule auparavant) et martyrisé sous Marc Aurèle est d'origine phrygienne. Irénée, son successeur, est de Smyrne. Blandine, la célèbre martyre, venait probablement d'Asie Mineure.
De fait, les religions nouvelles qui parcourent le monde romain (culte isiaque, mithriacisme...) venaient d'Orient.

Les Grecs de Grèce ne semblent pas avoir été particulièrement attirés par le christianisme. En effet, même si le paganisme était en déclin, leur formation intellectuelle les pousse plutôt vers les écoles philosophiques et leur besoin de salut vers les cultes à mystères (orphisme, éleusisme, isisme...), d'autant qu'ils distinguent mal le christianisme du judaïsme, pour lequel ils éprouvent généralement une forte aversion.

La conversion de Chazam est donc assez surprenante et son projet de soulever les Gaules utopique, sachant qu'il ne devait y avoir au mieux que quelques miliers de chrétiens sur une population estimée à huit ou dix millions d'habitants.

Donc, je propose de ramener ce jeune exalté à la raison à coup de pompe dans le train...

Ah... et on peut en garder un peu pour Jmlus

A bas Jésus, vive Zénon !
__________________
Ce sont les événements qui commandent aux hommes et non les hommes aux événements.
Hérodote

Rien n'arrête le progrès. Il s'arrête tout seul.
Alexandre Vialatte
Réponse avec citation
  #78  
Vieux 30/06/2008, 23h17
Avatar de marlouf
marlouf marlouf est déconnecté
Fan club La Tenaille Forever
 
Date d'inscription: août 2005
Localisation: Pôris
Messages: 3 697
Par défaut

Trés juste, tout cela ...
Aprés on peut imaginer que le panhéllénisme de Chazam (assez présent dans la communautée grecque ... ainsi en 64 ou 65 Néron avait déclaré une certaine "indépendance" à la Grece - trés limitée, certes, et vite infirmée dans les années qui suivirent ) bref cela l'aurait poussé vers une certaine detestation de Rome (que partageaient particuliérement les Chrétiens de cette époque)... de là, pourquoi pas une admiration qui le pousse à se convertir à la "secte" chrétienne au voisinage de l'Orient (il faut voir l'image qu'avaient le peuple romain des Chrétiens... comme cette histoire de bébé couvert de farine et poignardé, qu'on trouve dans l'imagerie romaine de l'époque de Marc Auréle)

Enfin bon tout cela se terminera soit à Rome, soit à Lyon (la ville qui connut le plus de martyrs dans les années 176-177), on retombe donc un peu sur le côté historique
Réponse avec citation
  #79  
Vieux 23/07/2008, 16h53
Avatar de marlouf
marlouf marlouf est déconnecté
Fan club La Tenaille Forever
 
Date d'inscription: août 2005
Localisation: Pôris
Messages: 3 697
Par défaut

Résumé des épisodes précédents (pasque c'est un petit peu le bordel )


Printemps 175. Otto Grandpieos, savant d’origine grecque, suit l’Empereur Marc Aurèle et sa femme Faustine dans leur déplacement, en tant que médecin personnel. L’empereur philosophe, tout juste sorti d’une guerre de plus de 5 ans avec les Germains et d’une grave maladie, quitte la rive du Danube avec 4 légions, marchant en direction de l’Egypte. L’un de ses plus brillants généraux, Avidius Cassius, est brusquement entré en rébellion et s’est proclamé empereur, apportant avec lui l’adhésion des territoires sous son commandement : la Syrie et surtout l’Egypte et son Nil fertile, le grenier à blé de l’empire romain.
Se sentant usé, vieilli et fatigué, Marc Aurèle demande à son fils, Commode, de se joindre au voyage. L’adolescent, au caractère déjà difficile, amène avec lui toute une Cour de parasites, dont un proxénéte notoire chassé d’Athènes, Schnickeon. A force de brutalité et de bassesses, ce dernier devient le favori de Commode, et détient potentiellement un pouvoir considérable.

Le voyage est long, très long, et se fait principalement par voie de terre. Les semaines s’écoulent, et Otto Grandpieos, du rôle de médecin, tombe dans celui d’amant de l’impératrice Faustine. Celle-ci, usant de la naïveté du médecin, soutire depuis longtemps déjà des informations auprès d’Otto quant à la santé de l’empereur.
Otto Grandpieos apprend ainsi que c’est Faustine, se basant sur la très mauvaise santé de Marc Aurèle, qui a en sous-main provoqué la rébellion du général Cassius : Sentant la mort prochaine de son mari, elle promet à Cassius sa main si celui-ci s’empare rapidement du pouvoir qui risque d’être de tomber dans les mains de Commode, encore bien jeune. Faustine espère t’elle régner à nouveau auprès de Cassius, quitte à se débarrasser de son propre fils, Commode ?
Le Général Cassius, justement, connaît des désillusions. Une partie des provinces de l’Orient sont restées fidèles à Rome, à commencer par la Cappadoce, où exerce le gouverneur Venitius Varron. Les troupes ne sont pas non plus toutes prêtes à faire allégeance au rebelle, et un centurion, Julius Sentencius, n’hésite pas à assassiner le général Cassius à l’été 175. Il apportera sa tête en trophée auprès de Marc Aurèle, qui s’en détournera, dégoûté. L’Empereur veut être magnanime, et déclare ne vouloir tirer aucune vengeance auprès de la famille du général assassiné. Dans les faits, il n’en est rien, et Sentencius traverse une partie de l’Empire pour ôter la vie aux membres de la famille Cassius.

Dans le même temps Faustine s’inquiète de plus en plus des révélations qui ne devraient pas tarder à faire surface : les lettres envoyées à Avidius Cassius, et qui révèle son implication dans ce complot. Déjà grandement commotionnée, et après plusieurs tentatives ratées de suicide, elle demande à son amant (et médecin) Otto Grandpieos de lui ôter la vie, n’hésitant pas pour cela à le faire chanter. Otto prépare un poison fulgurant puis, se ravisant, cache la fiole dans ses bagages. Pourtant, le lendemain, il découvre que la fiole a disparue, et que Faustine est morte durant la nuit : c’est son poison qui l’a emporté.
Ne sachant plus trop s’il a été directement ou non l’instrument du crime, Otto apprend, alors que tout l’équipage est enfin arrivé en Egypte, que Schnickeon, le favori de Commode, s’est emparé de la fiole pour faire boire le poison à Faustine. De plus, Schnickeon connait également la relation qui existait entre le médecin et l’impératrice. L’information semble avoir peu de valeur, puisque le corps de Faustine a déjà été incinéré et que la mort est naturelle… comme l’a annoncé le médecin de la Cour, là encore Otto Grandpieos…
Pourtant, Schnickeon dispose désormais d’une arme redoutable contre Grandpieos, qui peut l’amener directement à la décapitation.

Après plusieurs années d’absence, Marc Aurèle décide enfin de revenir à Rome, non sans passer par la Grèce. Otto espère y retrouver son frère, Chazam, qui tient à Athènes une florissante entreprise de commerce. Las, Otto apprend que lors d’un voyage en Palestine, son aventurier de frère a étrangement disparu.

De retour à Rome, fin 176, Otto engage un célèbre privé de la ville, Lucius Coelius, afin d’enquêter sur la disparition de Chazam. Coelius embarque aussitôt pour la Grèce puis la Palestine, entraînant avec lui son jeune fils, Jmlus, qu’il espère voir prendre la succession de son affaire dans les années à venir.
A Rome, l’ambiance devient très étrange. Commode est nommé Consul malgré son jeune âge et son inexpérience, et Marc Aurèle semble se tenir en retrait. Le pouvoir est donc détenu en partie par Commode et son entourage, où les favoris se font la guerre pour obtenir les faveurs du futur empereur. Schnickeon a de plus en plus de difficultés à garder son emprise sur Commode, surtout face à un favori sans scrupule comme Perenis : Ce dernier n’hésite pas à prostituer son propre fils Chal auprès de Commode afin d’avoir son appui. Enfin débarque à Rome le gouverneur de Cappadoce, Venitius Varron, qui fait éclater au grand jour l’odieuse traque au sein de l’Empire : la très grande majorité de la famille du générale Avidius Cassius a été assassinée par le centurion Sentencius, malgré les propos réconfortants de Marc Aurèle un an plus tôt. Venitius Varon présente à l’assistance le dernier fils survivant du général, Caius Avidius, et demande la pitié de l’empereur. Marc Aurèle, qui ne peut se déjuger, lance une enquête sur ces meurtres, dont la paternité rejaillit sur le favori de Commode, Schnickeon. Celui-ci doit abandonner les palais du Palatin et semble en bien mauvaise posture, tandis que Perenis et Chal, qui ont œuvré pour ce coup d’éclat, prennent sa place auprès du futur empereur.
C’est à cette période, courant de l’année 178, que Otto Grandpieos reçoit enfin des nouvelles non pas de Coelius l’enquêteur, mais de son fils Jmlus. Chazam est bien en vie, même si son voyage en Palestine a eu comme conséquence de refaire sortir sa fibre contestataire. Converti au christianisme, Chazam a fait des émules autour de lui, à commencer par Coelius. Les deux hommes ont ainsi embarqué pour Massilia, avec comme objectif final la capitale des Gaules, Lugdunum, où Chazam espère, par son radicalisme, lancer un vaste mouvement de rébellion contre la mainmise romaine.

Endormis depuis quelques décennies, les troubles religieux semblent ressortir un peu partout dans l’Empire, tandis que les Germains se montrent de nouveau menaçants, n’hésitant plus à faire des razzias sur les territoires au nord de la péninsule italienne...


Rome : au fait de sa gloire, ou au début de sa décadence ?

Dernière modification par marlouf ; 24/07/2008 à 08h26.
Réponse avec citation
  #80  
Vieux 23/07/2008, 23h24
Avatar de marlouf
marlouf marlouf est déconnecté
Fan club La Tenaille Forever
 
Date d'inscription: août 2005
Localisation: Pôris
Messages: 3 697
Par défaut

Chapite 14 : le Retour de Baton


Je laissais Jmlus rentrer chez lui, où il trouverait certainement une mère en pleurs, persuadée qu’elle était depuis des mois que son mari et son fils avaient été enlevés par des mercenaires du désert, ou s’étaient retrouvé sur un îlot oublié après le naufrage de leur navire. Ma colère contre l’adolescent était retombée, et j’imaginais maintenant les dangers qu’il courrait du fait de l’insouciance de Coelius. La loi était toujours sévère quant au prosélytisme chrétien, et les actions du père pouvaient fort bien nuire au fils – mais Coelius, malgré son aveuglement, avait du certainement en toucher un mot à Jmlus, puisque ce dernier s’était vu confier la tache de mettre sa famille à l’abris.

Cette notion même d’abris me glaçait le dos, car elle me donnait une idée (bien maigre, certes) de ce que Coelius et donc Chazam souhaitaient faire à Lugdunum. Je secouais la tête, imaginant Chazam à la tête d’une armée de chrétiens, parcourant la ville pour y mettre le feu à chaque lieu de culte romain. L’idée était absurde et aurait pu me faire rire, en d’autres circonstances. Or là, je tremblais pour Chazam. Ces événements m’avaient définitivement coupé le sommeil et je passais le reste de la nuit à visualiser les événements, ne sachant sur quel pied danser. Un instant, je maudissais Chazam et son intrépidité qui l’avait conduit à la ruine, et peut être au crépuscule de sa vie. La minute d’après, j’étouffais un sanglot et tentais d’élaborer une stratégie pour le sortir des griffes chrétiennes et le ramener à la raison. L’aube me surpris, croulant sous la fatigue et l’inquiétude, et je tombais comme une masse.



Le soleil se lève et baigne Rome de sa lumière étourdissante, et moi je ronfle …


Après mille atermoiements, je prenais enfin la décision de quitter Rome et de rejoindre Lugdunum à cheval. J’emmènerais avec moi un ou deux serviteurs afin qu’ils assurent ma sécurité, tandis que le climat particulièrement doux en ce fin d’hiver faciliterait le voyage jusqu’en Gaule. Je me rendais donc au Palatin, et faisait part à Marc Aurèle de mon souhait d’être libéré quelques semaines de ma tâche de médecin auprès de sa personne. L’empereur approuva ma demande après que je lui ai expliqué en quelques mots les faits sur la disparition de mon frère. Je prenais garde de cacher l’essentiel, à commencer par ces histoires de christianisme. Connaissant le tempérament de César quant à tout ce qui touchait aux chrétiens, je ne doutais pas une minute que mon expédition aurait été grandement compromise si je n’y avais fais ne serait-ce qu’une allusion.
Une fois obtenue son accord, je retournais chez moi, afin de mettre en place les préparatifs du départ, que je fixais à la semaine suivante.

Il était dit que chaque jour me préparait une nouvelle visite. A ma porte patientait un esclave armé qui me jaugea, avant de m’annoncer que son maître m’attendait à l’intérieur. L’esclave dégageait une forte odeur d’ail et j’en déduisais qu’il s’agissait certainement d’un gladiateur qui, par tradition, en mangeait des gousses entières afin d’inquiéter ses adversaires.
Comme je rentrais dans l’atrium, j’y trouvais, placé sous le regard inquisiteur de deux de mes serviteurs, Schnickeon.


La même vue, mais le lendemain


L’homme avait physiquement énormément changé en quelques mois : la disgrâce transforme un homme ! Ayant perdu tout son surpoids, Schnickeon était maintenant presque émacié, il se frottait nerveusement les mains et son regard dansait d’un point à l’autre, ayant du mal à se stabiliser en un endroit précis. Ses yeux… imaginais-je cette lueur malsaine, ou sommeillait-elle vraiment là ? L’homme avait perdu presque tous ses appuis, l’enquête demandée par Marc Aurèle n’avait pas encore abouti mais Schnickeon devait sentir déjà venir le souffle de la prison, d’abord, et de la mort ignominieuse qui allait de pair. Se sentant acculé, Schnickeon n’avait maintenant plus qu’un moyen de survivre : montrer les dents et se faire le plus menaçant possible. Aussi, alors que je lui demandais la raison de sa présence, il me répondit de faire sortir mes serviteurs. Il était désarmé, comme ils avaient pu le constater, et donc inoffensif. Quant à son gladiateur qui était resté à l’extérieur, j’en étais protégé par un mur épais et une solide porte. Je faisais sortir mes hommes, n’attendant qu’une chose, le départ de Schnickeon. Aussi, alors que je lui redemandais le but de sa présence, sa réponse me stupéfia.

« - Tu dois tuer César.

Je reprenais mon souffle, avant de lui lancer, encore choqué :
-Tu es complètement fou …
-Fou, non, déterminé, oui. Débarrasse toi de Marc Aurèle, quel que soit le moyen, et disparaîtra avec lui ton sentiment de culpabilité concernant Faustine. Ce ne doit pas être trop difficile pour toi de t’en approcher, et tu as déjà prouvé que tu étais très fort en poison. Bref démerde toi, mais tue le.

Négligemment, je me pinçais la paume de la main afin de m’assurer de la réalité de toute la scène. Reprenant mes esprits après ces terribles paroles, je pu lui répondre :

-Je ne veux pas discuter de cela plus longtemps ave toi. Tu connais la sortie, tu n’auras pas besoin que mes hommes t’ouvrent le chemin…
-Tue le, ou alors je m’arrangerais pour que après-demain, non demain, même, Marc Aurèle trouve un document prouvant ta participation au complot entre Faustine et Cassius. Comment réagira un empereur cocu, à ton avis ?
-Tu es malade, bon à enfermer… je ne toucherai jamais à la vie de César, quelles que soient les menaces que tu exerces sur moi… Et en quoi la mort de l’empereur te profiterait ?
-Oh, dans un premier temps ça prolongerait certainement ma vie de 30 ou 40 ans. La tienne aussi, par la même occasion, même si je ne pense pas que tu tiendras autant.

Je déglutissais, ayant la désagréable impression d’être un insecte pris dans les filets d’une araignée. Schnickeon avait toujours été dangereux, et maintenant qu’il était aux abois, il était plus que jamais un ennemi mortel.

-J’en parlerais à Commode. Je ne suis pas sur qu’il apprécie pleinement ce que tu projettes, et…
Schnickeon éclata alors d’un rire joyeux, presque enfantin, qui me glaça encore plus.
-Commode ? C’est déjà lui qui m’a demandé de donner le poison à sa mère, quand il a su le sort que Faustine lui aurait réservé avec l’aide de Cassius… Je ne suis pas sur qu’il passerait à l’acte pour son père, mais s’il devait mourir subitement, crois moi, le chagrin causé par la disparition de Marc Aurèle serait très rapidement calmé par son nouveau statut d’empereur.
-Et toi tu espérerais ainsi revenir dans ses bonnes grâces…

Ce fut peut être la pensée de Chazam, de la détermination dont il semblait habité, qui me donna le sursaut de courage qui me manquait jusque là.
J’avançais vers Schnickeon, prenant ce qui devait être mon air le plus menaçant, réellement pris d’une rage que je n’avais pas connue jusque là.

-Tu vas sortir de cette maison, et ne plus jamais y revenir. Par la même occasion, tu vas te fourrer tes menaces où je pense, car elles ne marcheront jamais sur moi. Si tu divulgues quoi que ce soit, ce sera ma parole contre la tienne, et j’y laisserai certainement des plumes, mais tu y laisseras aussitôt la vie, aussi sur que je suis médecin. Maintenant disparais de ton plein gré, ou ce sont mes hommes qui vont te faire sortir à coups de bâtons !

Cela sembla faire son effet sur Schnickeon, qui se détourna de moi et, après quelques instants, sortit de l’atrium en direction de l’entrée. Une exclamation retentit derrière l’un des portiques donnant sur la pièce et je vis l’un de mes serviteurs, Lafritius, s’approcher, un glaive à la main. Il me glissa :

-Maître, ne le laissons pas partir… tant qu’il est dans les murs, nous pouvons nous en débarrasser.
Je posais ma main sur son poignet, et Lafritius baissa son arme. Je n’étais pas comme tous ces Schnickeon, ces Perenis, ces Chal… la vengeance et la violence ne faisaient définitivement pas partie de mes mœurs.

Oh, bien sur, j’avais commis là une faute gigantesque, et jamais Schnickeon n’aurait du sortir de là vivant. Néanmoins, souhaiter la mort de mon ennemi était encore une étape qui me semblait insurmontable. Que j’étais naïf, voir bête !



Chez moi, ça craint …


Le lendemain, après un passage sur le Forum, je rentrais chez moi et trouvais la porte de ma demeure entrouverte. Alors que je blêmissais à vue d’œil et que j’allais hurler le nom de ma femme et de ma fille, Lafritius, qui m’avait accompagné dans la matinée, sortait son arme et me poussait de côté avant d’entrer le premier dans la propriété. Du coin de l’œil, je notais la présence d’une échelle posée contre le mur extérieur. Enfin, malgré les exhortations à la prudence de Lafritius, je courrais dans les différentes pièces de la maison. Ici et là, des traces de violence inouïe, derrière une porte, le corps inerte du cuisinier, sa poitrine se soulevant difficilement, une plaie béante sur le thorax par laquelle je voyais poindre quelques bulles de sang au rythme de sa respiration. Je détournais la tête, trouvais d’autres corps, mes serviteurs, tous transpercés par de furieux coups d’épée. Je vis Lafritius revenir des chambres à coucher, aussi blême que moi.
Je balbutiais :
-Et … Ma femme… ma fille … Où sont Randoma et …

Lafritius fit seulement un non de la tête qui était plus éloquent que n’importe quel mot. Je reprenais mon souffle avant de hurler dans la pièce dévastée par les hommes de Schnickeon.



PS : Sur cette partie, les images ne correspondent pas forcémment à l’intrigue… disons que je suis en période de rodage, j’ai fais des testes entre Imperium Romanum, Caesar IV et Civ City Rome
Le 1er screen en haut est tiré de Imperium Romanum, tandis que les 2 suivantes viennent de Caesar IV. J’ai essayé de reconstruire dans CaesarIV une ville sur le même fonctionnement que celle dans Imperium Romanum (des champs fertiles, entourés des habitations de la ville qui déborde) et même chose dans CivCity Rome (pas de screen ici : j’ai eu un soucis de sauvegarde… la flemme de recommencer)
Ca permet de se faire une idée sur les qualités graphiques du jeu (A mon avis, Civ Rome devant Caesar IV, lui-même devant Imperium Romanum), la richesse des édifices (Caesar revient en tête) et les possibilités et l’interet (et là aussi c’est Caesar que je priviligierais)
Réponse avec citation
Réponse

Outils de la discussion
Modes d'affichage

Règles de messages
Vous ne pouvez pas créer de nouvelles discussions
Vous ne pouvez pas envoyer des réponses
Vous ne pouvez pas envoyer des pièces jointes
Vous ne pouvez pas modifier vos messages

Les balises BB sont activées : oui
Les smileys sont activés : oui
La balise [IMG] est activée : oui
Le code HTML peut être employé : non
Navigation rapide


Fuseau horaire GMT +2. Il est actuellement 15h02.


Powered by vBulletin® Version 3.7.6
Copyright ©2000 - 2024, Jelsoft Enterprises Ltd.
Version française #19 par l'association vBulletin francophone