Discussion: AAR Imperium Romanum
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Vieux 01/06/2008, 23h02
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Chapitre 10 : Tous les chemins ménent à Rome



Rome et son périph bouché par les char à boeufs (enfin là, c'est dimanche)


Le temps du retour vers Rome était venu. Plus de 6 ans d’absence obligeaient maintenant l’Empereur à regagner le cœur de l’empire, et aucun danger ne pouvait légitimer plus longtemps sa présence aux frontières. La rébellion de Cassius avait pris fin, l’Arménie avait été provisoirement délaisse par les Parthes, et tout semblait indiquer que les Barbares ne feraient plus d’incursion au sud du Latium.
S’il ne pouvait donc différer son voyage, Marc Aurèle imposa un passage par la Grèce, où il espérait prendre un peu de temps pour rencontrer les philosophes athéniens, déambuler parmi les constructions magistrales de l’Acropole et retrouver un peu de sérénité. La mort de Faustine semblait l’avoir terriblement abattu, au point que les quelques 4 années qui lui restait à vivre semblaient, médicalement, inespérés.
Le voyage vers la Grèce prit bien moins de temps qu’à l’aller. N’ayant plus besoin de nous déplacer avec de lourds contingents armés, nous partîmes en équipage léger, laissant la fin du printemps nous pousser à travers la Syrie, tandis que nous faisions quelques haltes symboliques, à Antioche, Tarse ou Smyrne.

Bien que l’accueil se révéla généralement plus naturel que l’année précédente (l’absence des Légions, certainement…) je ne pus que constater un phénomène nouveau pour moi, qui ne connaissait finalement pas très bien l’Orient. Les sectes chrétiennes, sur le compte desquelles courraient les pires des horreurs, semblaient prospérer dans la région, alors que cette religion restait encore assez souterraine à Rome même. Des lieux de prière avaient été édifiés pour leur culte, tranchant particulièrement avec le faste que nous avions à servir les dieux du Panthéon. Marc Aurèle se révéla durant le voyage très critique quant aux us et coutumes des chrétiens, qui refusaient ainsi toute la lumière apportée par Rome.
Enfin, au cœur de l’été 176, nous entrâmes enfin à Athènes, laissant derrière nous les étapes les plus épiques de notre voyage. Si l’année précédente nous nous étions contenté de passer un peu plus au nord, j’avais là l’opportunité de retrouver des pans de mon passé, dont les souvenirs, au contact des lieux qui avaient bercé mon enfance, pouvaient enfin refaire surface.



Du haut de l'Acropole, 7 siécles nous contemplent


Marchant dans les ruelles de la vieille Athènes, je pouvais un peu oublier les événements de l’année passée, détachant enfin mon esprit des manigances de Schnickeon. Celui-ci s’était révélé particulièrement discret depuis notre affaire commune à Alexandrie, et c’est non sans une certaine joie que j’écoutais les ragots, toujours coutumiers à la Cour, parler des difficultés de Schnickeon pour garder son emprise sur Commode.
La lutte d’influence était le sport favori des intrigants romains, et Marc Aurèle n’avait pas fait mystère que son fils serait appelé à régner après lui. Schnickeon avait réussi à s’imposer auprès de Commode, ce qui s’était traduit par quelques cadavres abandonnés le long de la route qui nous avait conduit de la Grèce à l’Egypte. Il lui fallait maintenant consolider un peu plus sa position, alors que de nouveaux favoris louvoyaient autour de Commode.
Perennis, déjà présent depuis plusieurs mois dans cette longue suite, semblait l’étoile montante du régime qui se mettrait en place avec l’avènement du fils de Marc Aurèle. N’hésitant pas à prostituer son fils Chal, qu’il envoyait directement dans le lit de Commode, Perennis disposait d’un atout supplémentaire face à Schnickeon, qui pouvait difficilement rivaliser avec la jeunesse de Chal. Le climat de guerre larvée qui s’instaurait depuis quelques temps autour de la personne de Commode n’avait rien de feutrée, maintenant que Schnickeon avait pris toute la mesure du danger représenté par Chal et Perennis.

J’avais malheureusement bien conscience que je pouvais constituer une carte dans le jeu de Schnickeon depuis que celui-ci me tenait, restait à savoir quand et comment cela allait se concrétiser. Avec un peu de chances, Schnickeon ferait partie de la prochaine charrette de victimes, et la pression qu’il exerçait sur moi disparaîtrait aussitôt. Enfin cela restait une prière assez vaine, car j’avais pu observer comment le machiavélisme de Schnickeon lui permettait d’échapper aux embûches et de manipuler tout son entourage, à commencer par le fils de l’empereur.

Tandis que le début de l’automne s’étendait sur la Grèce et que Marc Aurèle s’initiait aux Mystères d’Eleusis, je me rendais dans les entrepôts où je savais que mon frère Chazam faisait fleurir son commerce. Je ne l’y trouvais pas – ce qui m’étonnait guère, le sachant certainement quelque part au bout du monde, à négocier tel ou tel objet dans des quantités pharaoniques – mais constatait une activité fonctionnant au ralenti.
Les assistants de Chazam me pressèrent de questions sur lui dés qu’ils apprirent qui j’étais, ce qui ne lassa pas de m’inquiéter. Désappointés d’apprendre que je n’avais pas eu de nouvelles de mon frère depuis que je l’avais croisé au nord d’Athènes un an plus tôt, ils me racontèrent ce qu’ils savaient.

Apparemment le voyage organisé par Chazam en Judée afin d’y faire du négoce avait tourné court, ou plutôt avait, à un moment ou un autre, sérieusement dérapé. Au bout de quelques mois, inquiet de ne pas avoir de nouvelles de leur patron, qui n’avait donné aucun signe de vie alors qu’il envoyait habituellement un nombre impressionnant de messages, de consignes et d’ordres divers, les assistants de Chazam avaient commissionné l’un des leurs afin de retrouver sa trace à travers les terres de Judée et de Samarie.
Il s’avéra que si le bateau sur lequel avait embarqué Chazam était bien arrivé à destination à Césarée, les contacts avec lesquels il devait négocier dans la région ne l’avait jamais vu. Certaines sources affirmaient bien avoir entendu parler d’un dénommé Chazam le Grec, mais ses pas semblaient s’être perdu quelque part du côté de Jérusalem. Après plusieurs semaines de vaines recherches et d’une enquête infructueuse, le négociant envoyé par les siens était revenu à Athènes, sans en avoir découvert plus. Depuis, se lamentaient les assistants de Chazam, l’activité avait considérablement freiné, les hommes étant dans l’incapacité de reproduire le génie aventureux de leur patron. Non seulement plus aucun nouveau contrat n’avait été mis en place depuis des mois, mais en plus le travail initié par la poigne de Chazam se heurtait maintenant à l’absence de celui-ci. Me montrant ainsi quelques ballots qui attendaient dans un des entrepôts, un assistant me confirma que de par sa jeunesse et son courage, Chazam s’était fait connaître jusqu’aux limites de l’empire, et que des hommes biens plus âgés que lui étaient incapables de faire preuve du charisme qui l’animait.
Sans Chazam, son commerce commençait dangereusement à péricliter. Assistants et négociants avaient attendu le plus longtemps possible, espérant un retour du jeune prodige, mais la désolation qui pouvait se lire sur mon visage enterrait tous les espoirs. La débandade sonnait, et les commerçants ne tarderaient pas à lâcher définitivement le commerce autrefois très lucratif mis en place par Chazam.

Follement inquiet pour mon jeune frère, mais ne sachant par où commencer une recherche qui jusque là avait été infructueuse, je rongeais mon frein, attendant impatiemment que Marc Aurèle lâche son étude de religions de bonnes femmes et daigne mettre le cap sur Rome.
Enfin le moment arriva ou l’empereur, certainement épuisé par tout ce qu’il avait pu vivre à Athènes, décida que nous devions retourner à Rome.
Alors que nous embarquions tous sur le bateau qui devait nous emmener à Brindisi, je ne jetais qu’un regard troublé sur les collines grecques. Ce fut pourtant la dernière fois que je vis ma patrie.
S’ensuivirent quelques jours de navigation, puis trois longues semaines nécessaires pour remonter toute la péninsule italienne. Le voyage nous emmenait vers le Triomphe organisé à Rome pour Marc Aurèle, absent depuis 7 ans, et son fils Commode, qu’il souhaitait nommer Consul.



Le tour du Monde en 2550 jours


La route fut longue, comme je vous l’avais déjà raconté au début de ce récit, et ce que je vis du Triomphe à Rome emplit mon cœur de peine, à voir un vieil empereur marcher à pied alors que son fils récoltait toute la gloire, fanfaronnant sur son char. Mais mes pensées étaient tournées ailleurs, vers l’homme qui venait de se présenter à moi dans la tribune que j’occupais, et d’où j’observais le pathétique spectacle d’une fin de règne.
L’homme était plutôt de taille moyenne, et portait sous sa toge un bien étrange vêtement, non par sa couleur ou sa matière, mais par le motif qui y était cousu.

« - C’est un hydre, j’ai acheté ce vêtement lors d’un voyage en terre Parthe, il y a de cela des années, cela remonte à ma jeunesse, avant que ce bonhomme ne naisse !

Et l’homme passa sa main dans la touffe de cheveux du garçon qui l’accompagnait, et qui ne perdait pas une miette du spectacle qui se déroulait plus bas.

Je portais mes yeux sur l’homme qui était en face de moi, et qui pour me saluer, me prit le poignet dans sa main droite. Je faisais de même.
-Tu es l’enquêteur dont on m’a tellement parlé ?

L’homme se redressa, fier que sa renommée soit allé jusqu’à l’entourage de l’Empereur.
-Oui, parfaitement ! Lucius Coelius, pour te servir. Et voici l’un de mes fils, qui j’espère prendra ma succession quand il sera plus vieux. N’est-ce pas, Jmlus ? »

Complètement insensible à la main de son père qui s’attardait sur sa chevelure débordante, Jmlus continuait à s’émerveiller devant le spectacle impérial.
Réponse avec citation