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Vieux 25/04/2008, 01h37
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Azul Mortal
 
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Par défaut La remontée de l'Amazone

Introduction :
Mes parents effectuent un tour du monde à la voile. A l'occasion de leur passage en Amazonie, possible uniquement sous escorte armée pour les bateaux de plaisance, je les rejoint pour 5 semaines dans leur périple. Plus tard, ma compagne Tania, nous rejoindra.



Jeudi 13 mars 2008 :
Parti la veille de Nantes, puis Paris, j’arrive à Rio de Janeiro dans la matinée. Juste le temps des formalités douanières et de retirer quelques Real et me voilà dans l’avion pour Belém.
A la sortie de l’aéroport je rencontre Martial, qui rejoignait également le RIDS (Rallye des Iles Du Soleil). Nous prenons le taxi ensemble jusqu’à l’hôtel Beira Rio, l’escale du rallye à Belem. Ce trajet me donne déjà un bref aperçu de la pauvreté générale de la ville. L’hôtel, étrangement , se situe dans un quartier assez pauvre au bord du Parà, un bras de l’Amazone. J’y retrouve mes parents ( Alain et Catherine) et je prend mes quartiers sur le Pulsion (un Dufour 44). Les 33 bateaux du rallye sont mouillés devant l’hôtel et il faut prendre l’annexe pour les rejoindre.
Je consacre le reste de la journée à récupérer de ces 24 heures de voyage (Caipirinhas, connection internet, piscine et resto).
Vendredi 14 mars : Aujourd’hui, nous partons tous les trois explorer Belém. Nous prenons le bus en direction du centre ville pour visiter le théâtre La Paz datant de l’âge d’or de Belém ( c'est-à-dire la période de l’exploitation du caoutchouc). Juste avant d’entrer, nous sommes accostés par un groupe de collègiennes pour une sorte de sondage pour leurs études, mais je les suspecte d’avoir surtout été intriguées par ma grande taille. Il est vrai que dans cette région, la population est en majorité d’origine amérindienne et d’assez petite taille.
Le théâtre quant à lui est très joli, avec sa marqueterie sophistiquée.
Nous nous rendons ensuite vers le marché « Mercado vero o peso », sur le port. On y trouve du poisson, des fruits ( maracuja et mangustan que j’apprécie particulièrement) et de la viande. Une viande qui traîne à l’air libre à 30 degrés et que les badauds tâtent à mains nue. Je comprend mieux d’où provient cette vague odeur de chair pourrie qui flotte sur un peu toute la ville. Sur le marché, nous trouvons également des petites échoppes où l’on mange du poisson accompagné d’açaì , un fruit très consistant qui se mange en bouillie ou en sorbet et qui pousse en forêt . C’est le plat traditionnel des indiens et la spécialité culinaire de la région.
Mais pour des raisons d’hygiène nous préfèrerons la galerie marchande moderne installée dans un hangar rénové où l’on trouve un restaurant « au poids ». C'est-à-dire que l’on paye au poids de l’assiette. Cette formule permet de découvrir de nombreux plats locaux délicieux.

La journée se poursuit en marchant à travers la vieille ville. Son architecture typique n’est pas vraiment mise en valeur et le quartier tombe un peu en ruine. Partout dans la ville de Belém, les gens s’activent dans tous les sens, roulent comme des fous aux volants de voitures flambant neuves qui détonent avec la misère apparente.
Nous finissons par trouver un petit parc zoologique avec plusieurs espèces d’oiseaux (dont les ibis rouge) et de papillons. Enfin un peu de nature et de calme !
Retour en taxi à l’hôtel via des sortes de favelas. Les gens y vivent très misérablement.

A l’hôtel, le soir, l’ambiance est toute autre lors de la soirée d’inauguration du départ de la remontée de l’Amazone : Caipirinha à volonté, discours officiels traduits (en ce qui concerne la ministre locale des sports et loisirs et d’autres officiels brésiliens dont l’identité importe peu), suivie d’un spectacle de danse réussit et très « hot », retraçant l’histoire de la région. Je profite également de la soirée pour faire connaissance avec les quelques jeunes du groupe. Pendant ce temps là, les parents profitent à fond de la caipirhina a volonté. Enfin, je pique une petite tête dans la piscine pour me remettre les idées en place et je ramène tout le monde à bord du bateau.


le port de Belém

Samedi 15 mars : C’est le jour du départ. Mais auparavant je vais retirer de l’argent avec ma carte car il faut faire le plein de cash avant de partir sur l’Amazone. L’opération n’est pas si facile car quasiment seule la HSBC permet de retirer de l’argent sans carte brésilienne. Mais encore faut il que le distributeur automatique accepte la VISA. Ce ne fût pas le cas au distributeur de l’Université et nous repartons en taxi à travers la favela pour trouver un autre distributeur.
Je profite également de la matinée pour donner les dernières informations par mail à Tania afin qu’elle puisse nous rejoindre à Almeirim. Un voyage un peu compliqué, que ce soit par voie fluviale ou aérienne.
Une fois revenus sur le bateau, le plein d’eau, de cash et de fruits effectués, nous attendons le départ de Belém prévu vers 15 heures. J’en profite pour attraper un gros coup de soleil, les rayons frappent vite et dur sous l’équateur !
Le navire guide/escorte, le Skalibur, finit par rejoindre le mouillage et nous partons.
Cette première étape sera assez courte, 4 heures environ, jusqu’ à un mouillage au bord de l’immense baie de Marajo dont on peine à voir l’autre rive. Le ciel s’est couvert de nuages gris et vaguement orageux comme c’est souvent le cas. Il fait même un peu frais en fin d’après midi et nous supportons une chemise.
La soirée sera courte, car demain il faut se lever à 4h00 pour une longue traversée.

Dimanche 16 mars :

Nous levons l’ancre vers 4h30 dans l’air frais (28 °C) de la nuit. Le convoi s’étire sur l’Amazone à une vitesse moyenne de 6 nœuds en slalomant entre les troncs d’arbre. Certains ont dû tomber de ces immenses barges qui descendent le fleuve chargées d’énormes quantités de rondins. Triste spectacle.
Nous arriverons à San Sebastian de Boa Vista vers 15h sans avoir essuyé d’averse. Le convoi passe en file indienne devant le village avant d’aller mouiller en face. Mouillés, nous le seront jusqu’au soir car la pluie tombera jusqu’à la nuit. Tout le monde restera à bord. De toute façon, nous avons 3 jours pour explorer les environs.

Lundi 17 mars :

Nous débarquons à SS Boa Vista en début de matinée. Le « Skalibur » fait office de sas et de ponton de débarquement auquel nous amarrons nos annexes.
La petite ville est très active, avec beaucoup d’enfants un peu partout.


les enfants de Boa Vista

Les gens sont tous très souriant et accueillants, les enfants adorent se faire prendre en photo. Mis à part une ou deux routes goudronnées, la ville est principalement lacustre. Les maisons sont en bois sur pilotis, avec en général un petit quai pour accéder au bateau.


la cité lacustre

Les habitants semblent passer la moitié de leur temps dans l’eau.


la vie dans l'eau

Certains membres du rallye se baignent dans l’eau marron de l’Amazone, mais j’hésite encore. Surtout depuis que j’ai vu quelques charognes traîner le long des berges boueuses. Malgré cet environnement, la ville et les gens sont assez propres, même en faisant leur linge dans l’eau de la rivière.
L’après midi nous partons explorer en zodiac le petit rio qui traverse le bourg. La balade est très agréable et la véritable exploration de l’Amazonie commence. La nature est magnifique et exubérante.
Lors de ces petites expéditions, il est nécessaire d’emmener la VHF, en cas de panne, et si possible de partir à plusieurs. Cette fois-ci nous étions accompagné de l’équipage du Sakti. Nous les retrouverons sur leur bateau pour l’apéro dans la soirée avant de nous coucher relativement tôt.

Mardi 18 mars : Cette journée ressemble un peu à la précédente : visite de la ville, du marché, photos avec les enfants, restau à midi. Il y a un cyber café avec une connection 56 ko, c’est pénible mais déjà mieux que rien.


pause resto à midi

L’après midi nous allons explorer un autre rio situé du côté du mouillage. Cette fois nous partons à 3 zodiacs pour une ballade d’environ 3 heures. Notre autonomie est relativement limitée puisque le courant nous oblige à utiliser le moteur la plupart du temps. Mais quand nous l’arrêtons pour continuer à la rame, nous pouvons enfin goûter au véritable charme de la forêt avec ses sons étranges qui bruissent un peu partout. La population locale, les caboclos (les métis indiens vivant au bord de l’Amazone), est très cool. Le stress de la vie moderne n’a visiblement pas atteint ces petits bras de rivière. Nous nous échangeons les coucous de la main et nous nous prenons mutuellement en photo. Il est souvent étrange de voir des gens vivre dans des sortes de huttes au milieu de la boue nous prendre en photo avec des téléphones dernier cri.


maison caboclo typique


la jungle commence ici

Malgré tout, la forêt semble vraiment impénétrable et l’on aperçoit quelques vols de perroquets au dessus de nous. Il est déjà l’heure de rentrer car un orage approche.
Dans la soirée nous mangerons les crevettes qu’un villageois était venu nous vendre sur le bateau avec sa pirogue.

Mercredi 19 mars :
Pour ce dernier jour à SS de Boa Vista, nous visitons l’usine de cœur de palmier dans la matinée. Cette visite improvisée nous a permis de discuter, en espagnol, avec le gérant qui nous a gentiment offert 3 boites de cœurs de palmier. Nous en mangerons le midi sur le bateau. Aujourd’hui le soleil cogne et nous restons un peu à bord avant de retraverser l’Amazone. A cet endroit de la rivière, il y a bien 2 kms entre les deux rives et il faut un peu limiter le nombre d’allers et retours entre le mouillage et la ville.
Il y a une soirée organisée par la mairie et nous flânons dans SS de Boa Vista en attendant les 19h00. La ville grouille de ses 8 000 habitants, dont certains d’entre eux n’ont, à ce qu’il parait, jamais vu de touristes dans le secteur. Avec le RIDS, la saison touristique dure désormais 3 jours par an ! Tous les gamins du coin nous tournent autour, simplement curieux ou dans l’attente d’un bonbon ou d’un stylo. Mais aucun ne mendie et il serait dommage que nous leur donnions cette habitude. D’ailleurs, les habitants nous font eux aussi souvent des cadeaux aussi surprenants qu’une chaise longue en bois par exemple (que nous refuserons, faute de place).
La soirée a lieu dans le restaurant/salle de fête du village dans une ambiance…villageoise, avec quelques habitants et gamins du coin venus participer à la réception. Nous avons droit à une petite démonstration de musique et de danse locale, le Carimbo, avec des enfants, ainsi que la désormais classique légende du dauphin rose qui se transforme en homme séducteur de femme. Ce sera la dernière soirée à SSBV, le départ est prévu le lendemain à l’aube.

Jeudi 20 mars :
Le convoi reprend sa route le long du rio Parà, le bras de rivière du delta qui longe l’immense île de Marajo, grande comme la Suisse. La veille doit être permanente car il y a toujours autant de troncs d’arbres qui croisent notre route.
En milieu d’après midi, nous mouillons près des îles Araras pour y passer la nuit. On nous a prévenus qu’il y aurait des moustiques, mais dans le ciel, nous ne voyons et n’entendons que des vols d’Araras (perroquets). A l’apéro, on parlera de serpents qui montent sur les bateaux durant la nuit, histoire de mettre un peu de piment à cette fin de journée assez inactive. Dans pareil cas, ou en cas de morsure par un animal, nous pouvons faire appel aux Bombeiros (les pompiers) présents sur le Skalibur.

Vendredi 21 mars :


le mouillage à l'aube

Le voyage reprend en direction de Brèves, la plus grande ville de l’île de Marajo (soit, environ 80 000 habitants). Je m’installe à l’avant du bateau dans un hamac afin d’observer les rondins. Un poste hautement stratégique !
Bientôt, un noria de petites pirogues se dirige vers le convoi. A l’intérieur desquelles, femmes et enfants, principalement, tentent d’aborder les bateaux pour recevoir bonbons et stylos. Heureusement, nous en avions quelques uns en stock pour l’occasion.



Quoiqu’il en soit, c’est surtout un prétexte pour nous approcher un peu et jouer avec les bateaux, car la manœuvre est souvent périlleuse.
video des pirogues
La rivière se rétrécit, mais par endroit il y a tout de même 33 mètres de fond !
Vers 13h nous arrivons à Brèves, encerclés par des gamins en pirogue. Ils s’agglutinent autour des bateaux au mouillage pour demander bonbons et stylo jusqu’à lassitude complète des uns et des autres.
En fin d’après-midi, un gros grain permet de remplir les cuves d’eau et de prendre une douche sous la pluie. Ca fait un peu pub pour gel douche mais je doute que nous renouvelions l’opération car le rinçage est très approximatif.
Aujourd’hui c’est Pâques et tout est fermé, y compris la station service. Mais demain, la journée à Brèves devrait assez chargée.

Samedi 22 mars :


Brèves

En ce jour de Pâques, tout le rallye se rend en "procession" à travers la ville, en passant par le marché, où les poulets sont égorgés sans autre forme de procès, l’église et enfin le centre culturel où se jouera une représentation de la Passion du Christ. Ce genre de spectacle me laisse en général assez froid (et la climatisation n’arrange rien), mais il faut admettre que les jeunes acteurs y mettaient de l’énergie et de la conviction. Du reste, le mélange de danse du ventre, de soldats romains au look inca, le tout en portugais avait quelque chose d’assez exotique.
Le reste de la journée s’écoula dans la lente moiteur amazonienne. La ville en elle-même ne présente pas beaucoup d’intérêt, on y trouve de nombreuses échoppes regorgeant de produits chinois (comme partout dans le monde) et, heureusement, quelques centres internet fonctionnant assez bien.


Tués, découpés, puis cuits dans l'échoppe d'en face


coupure pub (musique à fond)


la passion

Le soir, réception organisée par la municipalité : Caipirinha, danses folkloriques, la routine. En ville, les motos, 4x4 et jolies filles sont de sortie. Ici, la ville est plus métissée, plus grande qu’à SSBV et les gens ne font pas trop attention à nous. Néanmoins, j'apprendrai plus tard qu’une course poursuite a eu lieu entre notre escorte policière et une barque qui s’est un peu trop approchée du mouillage durant la nuit. Attaque ou simple curieux ? Nous ne le saurons probablement jamais. Mais j’apprend un peu plus tard que leurs deux occupants seront retrouvés morts dans une discothèque le lendemain…

Dernière modification par Tovi ; 25/04/2008 à 03h42.
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