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Vieux 25/04/2008, 03h41
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Azul Mortal
 
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Dimanche 23 mars :
Réveil un peu difficile au son des générateurs du Skalibur et des monocylindres fluviaux, avec en prime une petite tourista.
Au programme de la journée : une petite expédition dans une fazenda (ferme) à 60 kms environ. Je laisse les parents en ville et prend le taxi avec une vingtaine de membres du rallye. La route est boueuse et défoncée mais notre chauffeur passe avec brio les champs de boue. Excepté à l’entrée de la fazenda où il s’embourbe. Je prend une sorte de planche que je glisse sous la roue. Ca ne semble pas lui plaire mais cela s’avèrera efficace.


les joies de la saison des pluies

La ferme est aménagée en guinguette, avec de la musique très forte, comme d’habitude, et quelques tables au bord de l’eau. Je fais connaissance avec un perroquet qui grimpe sur mon épaule et prend quelques photos des Arras et Toucans qui déambule parmis les visiteurs du dimanche. L’endroit semble en effet apprécié des habitants de Brèves.


papagayo (perroquet)


Toucan


Arara (Ara)

Il faut dire qu’ici l’eau est plus propre et qu’on peut s’y baigner. Même moi qui ai été plutôt réticent à me plonger dans les eaux marrons de l’Amazone j’apprécie de me glisser dans ces eaux noires et transparentes (noires à cause du fond qui est noir). Je loue aussi une pirogue pour 2 reals, ce qui permet de m’éloigner un peu du bruit et de me faire mon petit trip « remontée de l’Amazone en pirogue » tout seul au milieu de la jungle.


Iguarapé en pirogue

En réalité, on est encore loin de la forêt vierge et l’arrière pays est plutôt composé de pâturages pris sur la forêt amazonienne.
Retour à fond sur la route défoncée, le chauffeur semble pressé de rentrer et double tout le monde avec sa petite voiture… je pense à tous ces 4x4 que l’on trouve à Paris et qui seraient bien plus utiles ici.

Lundi 24 mars : L’aventure continue, le convoi quitte Brèves dès 6h pour emprunter les petits bras de rivières qui rejoignent l’Amazone en contournant l’île de Marajo.



Quelques navires ont des avaries. Dans ces cas là, ils se font remorquer par le Skalibur, dans d’autres cas des Bombeiros plongent avec des bouteilles pour aller dégager des filets ou des plantes coincées dans les hélices. Sur le Pulsion, on profite du soleil pour réparer les nombreuses fuites de l’annexe.


le Skalibur en opération de remorquage

Dans les furo, ces chenaux plus ou moins naturels entre les îles, le passage est étroit et l’on peut observer la nature de près. Notamment de gros papillons noirs aux queues bleutées.
Si ces longues traversées au moteur nous permettent de recharger les batteries plus rapidement qu’avec le panneau solaire et l’éolienne, en revanche, notre stock de crayons et de bonbons diminue rapidement tant il y a de gamins en pirogue qui viennent s’amarrer aux bateaux.
Au terme d’une douzaine d’heures de navigation sous un soleil de plomb, nous nous arrêtons en un lieu nommé Tapajuru, pour la nuit. L’île de Marajo est désormais derrière nous. Nous sommes à peine entrés en Amazonie mais j’ai déjà la sensation d’être au milieu de nulle part tant la forêt semble immense. Le soir, on peut entendre des sortes de grillon chanter, suivis des grenouilles. Dans la nuit, un gros orage remplira à ras bord nos réserves d’eau. Je pense qu’au vu des quantités qui tombent tous les jours, nous pouvons l’utiliser sans compter.

Mardi 25 mars :
Ca y est, nous avons rejoint le fleuve Amazone à proprement parlé, encore qu’il soit difficile à identifier sur la carte GPS tant il y a de méandres, d’îles et de canaux en tout genre. Sans parler des îles flottantes qu’il faut éviter et qui cachent souvent un gros rondin de bois.
Nous nous relayons pour les quarts de veille à la barre. Pendant ce temps là, les activités à bord sont assez simples : lecture, écriture des blogs, cuisine, linge, sieste, photos et distribution de cadeaux aux caboclos.
Ainsi s’écoule la journée, dans la grisaille, jusqu’au mouillage du soir, à Mojoui, en face du petit village de Gurupà.



Mercredi 26 mars :
Prochaine étape : l’île de Macacos. Nous longeons les berges pour ne pas être freinés par le puissant courant de l’Amazone. Ce qui permet de voir le mur végétal de près et d’entendre les nombreux grillons dès que le soleil apparaît entre les nuages. Mais en dehors de quelques papillons nous ne voyons guère d’oiseaux. Nous les apercevrons une fois arrivés, en fin d’après midi, en descendant les petits iguarapés (bras de rivière) à côté du mouillage. A savoir : 2 toucans, 3 araras rouges et verts, des aigrettes, des aigles, de nombreux oiseaux pêcheurs et d’autres non identifiés.
Une bonne nouvelle m’attend au retour, un mail de Tania me confirmant son arrivée à Almeirim début avril.
Le soir, nous allons dîner sur Sakti. Il est étrange de s’habituer à la vie lacustre. Que ce soit sur les îles ou sur les bateaux, on ne touche jamais la terre ferme.

Jeudi 27 mars :
Réveil au son des bruits de la jungle (et des générateurs du Skalibur…). La forêt semble grouiller de vie, pourtant, les animaux sont assez difficiles à apercevoir. A l’exception de quelques moustiques qui commencent à apparaître. Comme il ne fait pas très beau, nous restons sur le bateau toute la journée. J’en profite pour travailler un peu mes cours du CNED …

Vendredi 28 mars :
Le voyage reprend à 6h30 le long de l’immense labyrinthe amazonien jusqu’à Porto de Mos, à 20 Nm. Un petit vent permet, comme souvent, de mettre le génois pour gagner un demi-nœud.
Porto de Mos est une petite ville amazonienne classique, avec la particularité de disposer de nombreuses moto-taxi. Nous commençons également à être habitués à la soirée organisée par la mairie, avec caipirhina et danses folkloriques d’enfants. Je n’ai d’ailleurs pas pu éviter une invitation à danser. Heureusement qu’elle était trop jeune car cela m’évitera une scène de jalousie lorsque Tania verra les photos.
démonstration de capoeira 1
démonstration de capoeira 2
La musique étant décidément trop forte, tout le monde rentrera vite aux bateaux. Hélas, à un autre endroit de la ville, la fête bat son plein, musique à fond, empêchant tout le monde de dormir. C’est dans ces moments là que l’on mesure la jeunesse de la population brésilienne : un tel niveau sonore à une heure du matin serait inimaginable dans n’importe quelle ville française.

Samedi 29 mars :
Le réveil est un peu difficile, mais le soleil aidant je suis vite d’aplomb pour la balade de la journée. Nous embarquons à 50 dans un camion de marchandises qui finira embourbé. Heureusement, il ne s’est pas renversé, mais il nous laisse à proximité d’un nid de fourmi rouges dont la morsure est particulièrement douloureuse.


vive la saison des pluies

Nous traversons à pied un quartier établi sur le site d’une ancienne tribu indienne. Le terrain est marécageux et sale. Depuis que la coupe sauvage de bois a été interdite dans la région (grâce à GreenPeace Brésil je crois), 40% de la population est au chômage et doit réapprendre à exploiter la forêt de façon durable, c'est-à-dire par la cueillette et la pêche principalement.
Nous prendrons ensuite un copieux brunch de fruits dans la petite fazenda, avant d’en rejoindre une autre à midi un peu plus loin, toujours en camion. Le paysan nous fera le tour de sa petite plantation et ses fruits étranges dont j’ai oublié le nom. La terre est rouge et sèche, parfois sableuse. On imagine sans mal que sans la forêt, ces terres deviendraient rapidement des zones désertiques lessivées par les orages.
Je me baigne dans une petite mare relativement propre avant de rentrer sur la bateau. J’ai mangé trop de viande et les odeurs de putréfaction alentours m’écœurent un peu.

Dimanche 30 mars :
Aujourd’hui nous effectuerons une nouvelle excursion dans les environs de Porto de Mos, en empruntant un bateau local cette fois. Première étape : une ferme sur piloti où l’on élève des buffles d’eau ( ?). C'est-à-dire qu’ils passent une bonne partie de la journée à nager. Au passage je découvre que je n’ai aucun talent pour la traite. Pas grave, je me rattrape sur la maîtrise de la pirogue en faisant un petit tour dans le marécage.


les buffles passent sous le ponton !

Deuxième étape : le village de Quilombos . Ainsi nomme t’on les descendants des esclaves en fuite qui ont souvent vécu complètement isolés du reste du Brésil. Le temps d’une coco gelado (du lait de coco glacé bu directement dans la noix avec une paille), d’une danse locale effectuée par les anciens du village cette fois et nous voilà déjà repartis vers PdM.


l'église des Quilombos. Minimaliste.

Avec l’humidité de la nuit qui s’évapore, l’atmosphère est très lourde et il fait trop chaud pour faire quoi que ce soit d’autre de la journée. D’ailleurs, entre 13h et 15h, la plupart des brésiliens font la sieste et tout est fermé.

Lundi 31 mars :
Aujourd’hui, la petite tribu RIDS (moins les parents restés sur le bateau) s’en va visiter une ferme de manioc avec le camion et un vieux bus. La ferme est assez rustique, pour ne pas dire misérable, mais les gens, comme ailleurs au Brésil, n’ont pas l’air malheureux.


ferme de manioc

Il existe deux sortes de maniocs, l’amer et le doux. L’amer contient du cyanure et en consommer tel quel entraîne la mort. C’est pourquoi il nécessite une certaine préparation (broyage, salage, décantation, séchage). Je n’ai pas vraiment discerné la différence entre les deux espèces à l’œil nu. Sa culture est simple : il suffit de planter un petit bâton dans le sol…


passage du manioc au tamis


récolte d'un peu de canne à sucre

Nous nous enfonçons un peu plus dans l’intérieur des terres quand soudain le bus derrière nous s’embourbe.


la saison des pluies c'est...bon je vais finir par me répéter.


Cette fois ce ne sont pas des fourmis rouge qui nous attendent mais une grosse mygale.


au pied de la tour de contrôle de l'aérodrome (une cabane en bois)

Mais le problème principal est de sortir le bus du trou. Finalement, il sera tracté par une élingue improvisée qui ne cèdera qu’une seule fois. Après avoir aidé à pousser le bus, mon tee-shirt est bon à laver.
A l’étape suivante nous découvrons la technique de cueillette de l’açai, qui consiste à grimper au palmier à l’aide d’une sangle en feuilles tressées autour des chevilles.
La route est longue, rouge, boueuse et chaotique jusqu’à la fazenda suivante. Petit à petit la forêt fait place à la campagne. Partout se dressent des arbres carbonisés, éventrés, comme le champ de bataille d’une guerre que livre l’Homme à la Nature. En l’absence des racines d’arbres, la terre argileuse rouge s’érode rapidement et laisse place à du sable. C’est tout le pays qui est menacé de désertification, même dans une région aussi pluvieuse que l’Amazonie.


déforestation récente


la couche d'humus

La pluie qui a duré toute la matinée s’arrête enfin et nous nous restaurons dans une petite fazenda autour d’un trou d’eau. Quelques animaux visibles ici : Jacaré (crocodile), Aras, tortues ( que je me refuse à manger ) et des sortes de gros ragondins amazoniens , les agoutis.
L’acalmie est de courte durée, sur la route du retour un énorme grain nous tombe dessus, et c’est une véritable tempête qui souffle sur le fleuve-océan. La houle et le vent fait déraper quelques bateaux au mouillage.

Mardi 1 avril :

Cette année il pleut plus que d’habitude et le niveau de l’eau est particulièrement élevé. Nous en profitons pour prendre un raccourci par le furo Aquiqui, plus au sud, pour éviter de naviguer à contre-courant de l’Amazone. Autre avantage : l’observation rapprochée des berges, puisque d’un bord à l’autre il n’y a qu’une trentaine de mètres. J’ai même pu observer furtivement deux dauphins.
Les caboclos du coin nous voyaient pour la première fois puisque le RIDS n’avait encore jamais emprunté ce passage. Nous échangeons les coucous habituels, tout en se demandant ce qu’ils peuvent bien penser de tels extra-terrestres. Je crois que certains habitants se méfient de nous car ils nous associent à des organisations écologistes.
Au fil de l’eau on aperçoit de temps en temps un anaconda mort, probablement tué par les villageois, pour se protéger eux même ou leur bétail (porcs, buffles…). Au loin, on commence à distinguer les premiers reliefs, signe que nous quittons le grand bassin d’alluvions du fleuve. Nous quittons le furo pour rejoindre l’immense lit de l’Amazone que nous traversons dans le sens de la largeur pour rejoindre Almeirim. A l’arrivée, nous avons droit à un petit comité d’accueil avec des pétards. Le soir, ce sera spectacle de danse, pour changer, mais au moins la population participe un peu plus que d’habitude à la fête.



Mercredi 2 avril :
Ce matin nous partons tous les 3 faire un petit tour de la ville. C’est pauvre, sale et sans intérêt avec une odeur persistante de charogne et de poubelle pourrissant au soleil.


Ah si, quand même, les cabines téléphoniques sont marrantes

L’après-midi sera plus constructif avec la visite du collège public (et catholique). Vient ensuite une réunion avec les élèves au cours de laquelle nous échangerons des questions sur les uns et les autres. Les plus curieux d’entre eux auront droit de visiter nos bateaux . Nous en accueillerons deux avec qui nous aurons une discution un peu fastidieuse en portugais. Du reste, elles étaient au moins aussi intéressées de savoir si j’étais célibataire que d’en savoir plus sur le bateau.



Dans la soirée je pars en virée avec quelques membres du rallye et policiers en civil pour goûter à la chaude ambiance des soirées brésiliennes. Je resterais bien entendu très sage car c’est dans la matinée que Tania doit arriver par bateau, sur le « Macamazon ». Je l’attend avec impatience.

[à suivre...]
Réponse avec citation