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Vieux 11/01/2008, 11h23
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Un débat que j'avais manqué... (quelle idée de partir en vacances aussi ).

D'abord, deux remarques :

- l'armée romaine était constituée de deux types de troupes : les légions, recrutées parmi les citoyens romains et les auxliliaires, non citoyens romains (mais qui le devenaient souvent à la fin de leur engagement). Les fameuses réformes de Marius avaient permis de recruter les soldats parmi les citoyens qui n'avaient pas le cens, donc les moyens financiers, d'être recrutés comme légionnaires (donc c'était des gens non propriétaires, qui devenaient de facto des soldats professionnels), mais c'étaient quand même des citoyens. Quand les soldats de la dixième légion se révoltent, César les interpellent en les appelant "Quirites", ce qui signifient "citoyens civils", pour bien leur montrer qu'ils ne les considèrent plus comme des soldats, mais ce qui veut bien dire qu'avant d'être soldats, ils étaient citoyens. Donc les armées étaient constituées en grande partie de citoyens, et même après l'implantation du principat.

- nous parlons d'empire pour désigner la période qui débute avec le principat d'Auguste, mais il s'agit d'une notion moderne. L'empire romain existait avant le principat, sous la "république" (en fait une oligarchie) et la république se poursuit sous le principat. En effet, Auguste a changé la nature du pouvoir et non les formes : il cumule une grande partie des pouvoirs, mais ce sont des pouvoirs qui existaient déjà sous la "république". D'autre part, il laisse certaines attributions au Sénat (dont il est par ailleurs le "prince" ). Et c'est une des grandes questions (faiblesses ?) de l'"empire" : il n' y a aucune régle de succession, pas de dynastie légitime - tout homme assez puissant pour s'emparer du pouvoir est le prince légitime... jusqu'à ce qu'un autre plus fort prenne sa place. (Ceux qui sont intéressés par la nature du pouvoir "impérial" peuvent lire le début du livre de Paul VEYNE "L'empire gréco-romain" dont j'ai du parler ailleurs sur le forum - pour paraphraser Coelio "Les gens ne lisent pas assez mes vieux posts" ). Evidemment, tout cela va évoluer avec le temps.

Quant à la question des frontières "idéales" de l'empire romain, il n'y a pas vraiment de réponse. Bien sûr, le territoire romain aurait pu englober la Germanie, la Mésopotamie, etc... mais il aurait alors été au contact d'autres populations potentiellement dangereuses...
En fait, c'était un monstre et je trouve miraculeux qu'il ait pu durer aussi longtemps. Le grand facteur unitaire, du point du vue économique et géographique, était la Méditerranée qui permettait des communications relativement rapides et faciles entre les contrées limitrophes, et ce n'est pas un hasard si il s'est constitué d'abord sur ses rives, et l'empire s'est mainenu - sous sa forme byzantine, dans des régions méditérranéennes. Mais même ainsi, il était presque ingouvernable, ce qui a abouti aux réformes de Dioclétiens (la tétrarchie) puis à sa séparation en deux entités distinctes. D'autre part, les historiens modernes pensent que la population de l'empire a diminué environ de moitié entre l'apogée (I-IIème siècle ap. J. C.) et le Vème siècle, les textes nous montrant en effet des régions entières complètement dépeuplées, les "invasions" barbares étant tout autant une immigration pour occuper ces espaces que des expéditions militaires (les barbares ne visant nullement à détruire l'empire, mais voulant bénéficier de sa prospérité supposée). D'où une terrible crise économique (et également monétaire) qui rendait de plus en plus difficile l'entretien des structures étatiques, et surtout des armées. D'ailleurs, les armées "romaines" à la fin de l'empire étaient essentiellement constituées de barbares, tant du fait de la dépopulation de l'empire que de la désaffection totale des "romains" pour le métier militaire.

Je dirais donc qu'il n'y avait pas de fontières "idéales", car l'empire romain a disparu essentiellement pour des causes internes, indépendantes de la question des frontières.
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